Apprendre aux plus jeunes à se respecter entre eux, c'est la mission que s'est confiée l'Institut Sint-Guido (Anderlecht). © Istock

Ecole : Lorsque les enfants résolvent eux-mêmes les conflits

Stagiaire Le Vif

Contre la violence, privilégier les mots. C’est l’initiative de l’Institut Sint-Guido, à Anderlecht, qui forme les tout jeunes à résoudre leurs propres conflits. Une politique pédagogique qui a le soutien de la reine Mathilde.

Quand des enfants se chamaillent entre eux, que faire ? La question doit certainement effleurer l’esprit de nombreux parents, soucieux d’adopter la réaction la plus appropriée quand leurs progénitures font des bêtises. Mais en tant qu’instituteur ? Si l’une des aptitudes de l’enseignement est de savoir gérer avec sang-froid le comportement de ses élèves, certains jeunes professeurs éprouvent parfois du mal à se faire respecter. Un des meilleurs exemples est la cour de récré, un endroit où la violence entre élèves peut prendre une tournure difficilement maîtrisable.

Marleen Van Criekingen, institutrice à l’Institut Sint-Guido, témoigne pour le journal Le Soir ; « il y avait beaucoup de bagarres quand je suis arrivée, explique celle qui enseigne depuis douze ans. Des vraies batailles, avec les autres enfants en cercle qui encourageaient. » Des cas de figure auxquels elle fut confrontée dès son premier jour et qui ont fait longtemps partie du quotidien de ce collège réputé difficile. Mais ça, c’était avant…

La parole aux plus jeunes

Pour contrer ce problème, l’Institut a mis sur pied une nouvelle politique de prévention de la violence dans ses murs : laisser les enfants résoudre eux-mêmes les conflits. Non pas par les coups, mais par le dialogue et l’écoute.

Depuis six ans, le corps professoral encadre les élèves pour leur faire prendre conscience de leurs responsabilités. La première chose à apprendre est de peser le pour et le contre d’une situation et oser exprimer son désaccord. « C’est important que les enfants apprennent à gérer leurs problèmes sans systématiquement aller tirer la manche d’une adulte », explique Mme Van Criekingen, interrogée par Lorraine Kihl.

Au moment du lancement de la formation, la Flandre appliquait les mêmes méthodes, mais uniquement pour les élèves plus âgés du secondaire. Un écart de mentalité qui a nécessité l’aide d’une personne spécialisée avec les adultes pour coacher l’équipe pédagogique. La méthode consiste en plusieurs règles que les élèves coacheurs doivent appliquer en cas de besoin. Cela va d’une écoute assidue à des réponses convenablement formulées en passant par le travail du regard.

Et les enseignants dans tout ça ? Bien que restant à l’écart, ceux-ci gardent un rôle attentif, l’oreille collée au… talkie-walkie ! Une initiative originale qui leur permet d’être informés d’un conflit quasiment en temps réel. Leur tâche est ensuite de rassembler jeune médiateur et élèves responsables pour qu’ils s’expliquent à l’écart, dans le QG de la help team, une petite maison jaune spécialement conçue dans un coin de la cour.

Une pédagogie par étapes

Arriver à ce genre de discipline a évidemment demandé pas mal de travail. Les professeurs ont d’abord dû améliorer le vivre-ensemble dans la cour, en commençant par redéfinir les bons et mauvais comportements. Ensuite, un système de cartes de couleurs a été imaginé pour sanctionner les fautes. Un peu comme au football, chaque élève qui transgresse une règle écope d’abord d’une carte jaune, pour un premier avertissement, puis d’une rouge synonyme d’expulsion (non pas sur le banc, mais de plusieurs récrés). Parfois, il arrive qu’une bonne action soit récompensée par un carton vert. Enfin, il a fallu remédier à un ultime problème : l’ennui. Un élève qui se montre violent et qui se bat avec les autres, c’est parce qu’il n’a rien d’autre à faire, d’où l’importance de lui fournir l’espace et les jeux nécessaires.

Une initiative qui porte ses fruits

« On n’a plus du tout de cas de harcèlement, confirme Marleen. Je pense qu’à force d’éteindre les débuts d’incendie, rien de grave ne prend. » Une réussite pédagogique qui s’est muée en reconnaissance pour l’Institut Sint-Guido, que l’enseignement flamand vient d’honorer du premier prix Tumult qui souligne chaque année les meilleures initiatives scolaires contre le harcèlement.

Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, la reine Mathilde en personne est venue ce lundi visiter l’établissement, où elle a pu s’entretenir avec les professeurs et les élèves. « Quand j’ai vu l’aplomb avec lequel ils répondaient à la Reine, j’étais émerveillée ! se souvient Mme Van Criekingen. Ce sont des enfants bien dans leur peau, et ça c’est le coeur du projet. J’espère vraiment que dans cinq, dix, quinze ans, quand ça n’ira pas, ils pourront se souvenir de ça. Se souvenir qu’une reine a dit qu’elle était fière d’eux. »

Fière de voir combien une pédagogie pas comme les autres peut s’avérer bénéfique et confirmer l’adage que « la violence ne résout rien »

Guillaume Alvarez

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