Maggie De Block et Denis Ducarme © BELGA

Ducarme: « du fipronil détecté dans des oeufs aux Pays-Bas dès novembre 2016 »

La Belgique a dû attendre un mois avant d’obtenir des réponses à des questions posées à l’Agence de sécurité alimentaire néerlandaise au sujet de la contamination d’oeufs au fipronil, a déploré mercredi le ministre de l’Agriculture Denis Ducarme en Commission à la Chambre. Le rapport qu’il a reçu de l’Afsca fait aussi état de la présence de fipronil dans des oeufs aux Pays-Bas détectée dès novembre 2016. « Aucune confirmation officielle des Pays-Bas ne nous est parvenue », assure le ministre.

L’Afsca explique, dans un compte-rendu chronologique publié mercredi, s’être retrouvée « par hasard » en possession de deux notes, datées des 22 et 25 juillet derniers. Dans celles-ci, l’Agence alimentaire des Pays-Bas (NVWA) fait rapport à son ministre. « Il ressort clairement de ces notes que les Pays-Bas étaient déjà au courant depuis fin 2016 de la problématique du fipronil et de l’utilisation de ce produit sur son territoire dans le secteur des volailles et dans les exploitations de poules pondeuses en particulier », précise l’Afsca.

« Si nous avions eu ces informations avant, la vigilance aurait été accrue », a commenté Denis Ducarme. « Mais nous ne disposions pas de ces informations, tout reposait donc sur l’autocontrôle. »

Le nouveau ministre de l’Agriculture a par ailleurs déploré qu’un mois se soit écoulé entre une demande de l’Agence pour la sécurité de la chaîne alimentaire à son homologue néerlandais au sujet d’une société de service avicole néerlandaise et d’un producteur d’aliments pour animaux aux Pays-Bas. Une demande encore réitérée le 26 juin.

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L’Afsca a reçu ce jour-là des informations concernant des contrôles réalisés chez des fournisseurs d’aliments néerlandais, mais toujours pas celles concernant la firme objet de la question. « Or, cela nous aurait permis d’identifier plus rapidement la liste des clients de cette entreprise », a encore déclaré Denis Ducarme.

Le 13 juillet, soit près d’un mois après sa demande formelle, l’Afsca a obtenu une double notification de ses voisins. Ceux-ci précisent premièrement que mi-mars, un paquet contenant du fipronil, au nom personnel d’un producteur/distributeur belge de Dega-16 (insecticide censé être naturel) à destination d’une adresse néerlandaise, a été saisi à l’aéroport de Schiphol. Ensuite qu’une enquête criminelle avait été ouverte à l’encontre de la société de service avicole néerlandaise. A partir de ce moment-là, l’agence néerlandaise « ne peut plus nous communiquer les informations que nous lui réclamons depuis un mois. Elle ne communiquera dès lors jamais d’elle-même les informations demandées par l’Afsca. »

« Un mois! », a répété Denis Ducarme. « Un mois sans la moindre information de l’agence néerlandaise. Cela veut dire quoi? Cela veut dire que nous n’avons pas pu avoir accès à la liste des clients de la firme hollandaise, et que l’Afsca n’a donc pas pu déterminer plus tôt le périmètre suspect qu’elle a pu déterminer par la suite, et qui concerne 86 exploitants. Nous avons donc perdu un mois pour faire les tests. Et cela, ce n’est pas possible. Quand un pays comme les Pays-Bas, un des plus gros exportateurs d’oeufs, ne transmet pas cette info, ça pose vraiment problème! »

« Nous sommes face à une fraude », a-t-il encore affirmé. « Et les fraudeurs doivent être sanctionnées durement par la justice, parce que pour s’enrichir personnellement, ils n’ont pas hésité à exposer la santé des consommateurs. »

L’Afsca charge également les Pays-Bas, pointant des problèmes avec le laboratoire d’analyse néerlandais et la non-divulgation d’informations essentielles par les autorités néerlandaises.

Le juge d’instruction avait demandé de ne communiquer que sur la santé publique

Lors des phases d’analyse et de traitement de la première contamination recensée, et d’enquête consécutive à la découverte de la source de contamination, l’Afsca estime qu’elle n’avait pas besoin de communiquer au grand public, ayant en effet « directement fait le nécessaire afin d’éviter, depuis l’exploitation concernée, la progression de la contamination dans la chaîne alimentaire ». De plus, les teneurs en fipronil détectées lors des analyses restaient sous le seuil de sécurité européen (0,72 mg/kg, ndlr). « Aucun risque n’émanait pour le consommateur. »

Cependant, après le 20 juillet, une perquisition menée dans une firme belge productrice et distributrice du Dega-16, un insecticide aux composants censés être naturels, a montré que l’utilisation dans le secteur avicole de fipronil, interdit, comme insecticide contre le pou rouge « était potentiellement beaucoup plus large que ce qu’on pensait » initialement. Or, même après ce constat, l’Afsca « n’a pu communiquer que sur les mesures de santé publique ». « Dans le cadre de l’enquête judiciaire, qui était encore en cours et pour laquelle plusieurs devoirs d’enquête étaient encore planifiés, le juge d’instruction a expressément demandé qu’aucune information autre que les mesures de santé publique ne soit diffusée », justifie l’agence. Cette interdiction lui a encore été confirmée le 25 juillet.

Par ailleurs, le parquet a également demandé que les noms des entreprises suspectées ne soient pas cités.

« L’Afsca s’en est tenu à cela, malgré toutes les critiques sur les rares informations qui ont été diffusées. A aucun moment, le secret de l’enquête n’a empêché que le consommateur » soit averti si un problème était constaté et un rappel nécessaire, poursuit le document.

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