Nicolas De Decker

Didier Reynders, une certaine idée de la camaraderie

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Jeudi soir, à la RTBF, Didier Reynders a parlé de Jacqueline Galant. Tout le monde parle d’elle depuis dix jours, de son « imprudence » et de sa « bonne foi », de son cabinet et d’un cabinet d’avocats. Lui pas. Il se taisait depuis dix jours.

Tout oppose Didier Reynders à Jacqueline Galant. Tout.

Il est un homme, elle pas.

Il parle bien, elle pas.

Il aime lire, elle pas.

Il est surdoué, elle pas.

Elle est chaleureuse, lui pas.

Elle est empathique, lui pas.

Elle est wallonne, lui plus.

Elle est bourgmestre, lui pas.

Et puis surtout ils sont membres du même parti, le Mouvement réformateur.

Il est reyndersien, et elle pas.

Elle entretient avec Louis Michel une relation, dit-on, filiale, lui pas.

Il entretient avec le fils de Louis Michel une relation, dit-on, brutale, elle pas.

Il est ministre, elle aussi. Ils ne s’aiment pas.

Il la méprise, du haut de sa très uccloise altesse. Elle le dénigre, du bas de sa très boraine franchise.

Elle a plein de problèmes.

Pas lui.

Jeudi soir, à la RTBF, il a parlé d’elle. Tout le monde parle d’elle depuis dix jours, de son « imprudence » et de sa « bonne foi », de son cabinet et d’un cabinet d’avocats. Lui pas. Il se taisait depuis dix jours. Tout son parti se taisait, en fait. Elle aussi. Une partie de son parti panique. Elle aussi. Une partie de son parti ricane. Lui aussi.

Il n’a pas refusé l’invitation de la RTBF à « Jeudi en Prime ». Il l’a confirmée et maintenue. Pleins de joie nos confrères, pleine d’espoir l’opposition, pleins de crainte les réformateurs, Jacqueline Galant encore plus.

On s’attendait à du bruit.

Or, tout en parlant à nos confrères, Didier Reynders a continué à se taire. « Le Premier ministre s’est exprimé très clairement », a-t-il dit. « Jacqueline Galant transmettra au Parlement tous les documents, et le Parlement se positionnera », a-t-il aussi dit. Autant dire : rien. Figeant la joie de nos confrères, éreintant l’espoir de l’opposition, Didier Reynders s’est tu.

Jacqueline Galant a respiré. Charles Michel aussi. Olivier Chastel aussi.

Mais après le furtif soulagement peut revenir la crainte : si Didier Reynders n’a rien dit, s’il a su brider son envie de médire, c’est qu’il avait une raison.

Cette raison, on ne la connaît pas.

Mais Didier Reynders, on le connaît : on peut donc déjà éliminer la pitié.

S’il s’est retenu, c’est qu’il pourrait avoir besoin, bientôt, de Charles Michel. Comme elle.

Alors, soit Didier Reynders pense qu’elle ne va pas démissionner, qu’il ait parlé ou pas jeudi soir à la RTBF, ce qui est possible.

Soit il pense qu’il ne lui était pas nécessaire de parler pour que Jacqueline Galant quitte bientôt son poste, ce qui est encore plus possible. Elle a encore bien raison de s’inquiéter.

Lui pas.

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