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Di Rupo Ier brosse son grand oral

L’accord de gouvernement s’y engage noir sur blanc : six semaines après leur entrée en fonction, les ministres fédéraux devaient prouver aux députés qu’ils avaient réellement l’étoffe. Le passage sur le gril vire à l’échange de vues de pure routine, sans conséquences fâcheuses. Cherchez le geste fort.

Restaurer la confiance très abîmée : il existe des gestes pour ça. Et des gestes forts, quand le fossé creusé entre le politique et le citoyen est à ce point profond. Elio Di Rupo et toute son équipe s’y sont engagés, noir sur blanc. Promis juré, le Parlement ne comptera pas pour des prunes : les nouveaux ministres fédéraux devaient le prouver, et sans tarder.

L’accord institutionnel en fait foi : « Dans les six semaines qui suivent la première séance du Parlement après leur désignation par le Roi, les membres du gouvernement exposent, devant la commission de la Chambre compétente en la matière, leur vision des défis dans le domaine de leur compétence, et la manière selon laquelle ils envisagent de s’y attaquer. »

Consacrer trois lignes à vouloir de cette manière renforcer le rôle du Parlement : on se dit que l’exercice qui est annoncé ne sera pas une simple formalité. Il y a de la rupture dans l’air, assure-t-on d’ailleurs gravement. Rien à voir avec la tradition des notes de politique générale que présente chaque ministre en début de session à la Chambre, et qui sont débattues par les députés. Il s’agit cette fois d’aller un cran plus loin.

Effet d’annonce et coup dans l’eau

Sans pousser jusqu’à l’examen de passage comme celui qui est imposé aux nouveaux commissaires européens (certains en rêvaient), l’audition prévue devait au moins permettre aux parlementaires de voir ce que le nouveau ministre a réellement dans le ventre. Le tout serait d’ailleurs au besoin sanctionné par des recommandations votées en fin de séance. C’est dire.

Six semaines se sont écoulées. Et strictement rien de neuf à signaler. Rien que la valse classique des échanges de vue à la Chambre, sur fond de notes de politique générale. Lesquelles se révèlent d’une consistance d’ailleurs plus que variable : 5 pages pour la Défense, 6 pages pour la Fonction publique, 18 pages pour la Justice, mais 35 pages pour les Finances ou 47 pages pour l’Intérieur.

Plus enquiquineuse que jamais, l’opposition N-VA a bien cherché à savoir tous azimuts où en restaient ces fameux passages sur le gril : les ministres ont éludé la question. Les nationalistes flamands ont même été gentiment recadrés, pour avoir voulu « sortir du sujet » en sondant le Premier ministre Di Rupo sur certaines de ses intentions.

Loupés, les grands oraux annoncés. « Formellement, c’est exact », confirme le président de la Chambre André Flahaut (PS). Qui plaide les circonstances atténuantes : l’urgence du calendrier politique a eu raison des meilleures résolutions. « Mais dans la pratique, les débats liés aux notes de politique générale tiennent lieu d’épreuve pour le ministre. »

Il faut donc en déduire que le reste n’est que littérature et effet d’annonce, au chapitre du renouveau politique.

Pierre Havaux

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