Gérald Papy

Derrière Guéant, un « système Sarkozy » ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Soupçonné de transferts suspects d’argent, l’ancien ministre français de l’Intérieur Claude Guéant répond par une défense calamiteuse. Au bout des révélations, c’est Nicolas Sarkozy qui risque d’être à nouveau affaibli.

L’horizon politique s’assombrit pour l’ancien chef de l’État français Nicolas Sarkozy, toujours candidat potentiel à l’élection présidentielle de 2017. Car il aura beau prendre ses distances avec son ancien ministre de l’Intérieur Claude Guéant aujourd’hui mis en cause, il aura beaucoup de mal à faire oublier que celui-ci a surtout été un de ses fidèles collaborateurs tout au long des années 2000 dans son irrésistible ascension vers la présidence.

C’est d’ailleurs à l’occasion de perquisitions dans le cadre d’affaires concernant Nicolas Sarkozy (le règlement du dossier Tapie – Crédit lyonnais et le soupçon de financement de sa campagne électorale par la Libye) que les enquêteurs ont découvert des opérations suspectes dans les comptes de Claude Guéant. Or la défense initiale de l’ancien secrétaire général de l’Élysée a été battue en brèche par la réalité. Pour justifier le règlement en liquide de factures de 20 000 à 25 000 euros, il excipait le recours à une cagnotte du ministère de l’Intérieur autorisant des primes en liquide. Pratiques auxquelles le Premier ministre socialiste Lionel Jospin avait mis fin en 2002 et qu’un certain Claude Guéant, directeur général de la police nationale, proscrivait dès 1998, comme le révèle Le Canard enchaîné cette semaine. Pour expliquer le versement d’une somme de 500 000 euros sur un de ses comptes, Claude Guéant évoque la vente à un avocat malaisien de deux tableaux du peintre hollandais Andries Van Eertvelt dont les spécialistes du marché de l’art évaluent la valeur à quelque… 23 000 euros. Une juteuse affaire.

Bref, Claude Guéant se retrouve dans de sales draps et, en regard de cette défense calamiteuse, a décidé de ne plus s’adresser aux médias. Non sans avoir été piégé auparavant, pour le compte du Canard enchaîné qui a révélé l’affaire, par l’humoriste Gérald Dahan qui, se faisant passer pour l’actuel ministre de l’Intérieur Manuel Valls, lui proposait téléphoniquement une sorte de deal pour éviter un nouveau discrédit de la classe politique après l’affaire Cahuzac. Tout de même méfiant, Claude Guéant a su éviter de commettre l’irréparable dans ses propos. Mais il n’en reste pas moins au coeur d’une mystérieuse affaire qui a conduit un juge d’instruction à ouvrir une information judiciaire. Derrière Claude Guéant, c’est Nicolas Sarkozy qui risque à nouveau d’être fragilisé par les révélations à venir. En tant que directeur de cabinet quand lui-même était ministre de l’Intérieur, puis secrétaire général de l’Élysée, directeur de sa campagne électorale et enfin ministre de l’Intérieur, Claude Guéant a vécu au coeur du pouvoir sarkozyste. Sa priorité est-elle aujourd’hui d’éviter la mise au jour d’un « système Sarkozy » ?

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