Gérald Papy

Demain, une Eglise modernisée ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Courage, humilité, modernité… La démission de Benoît XVI, annoncée le 11 février au Vatican à la surprise quasi générale, a suscité une multitude d’éloges, témoignages avant tout d’un grand respect pour une décision qui, quoique intime, engage l’Eglise catholique et son 1,2 milliard de fidèles.

Que Benoît XVI, pape réputé intellectuel et peu rompu au travail de terrain, ait fait preuve d’un tel pragmatisme, qu’il ait posé un acte d’une grande liberté alors qu’il était apparu tout au long de son pontificat prisonnier de son passé ou de son entourage traduit à suffisance le caractère paradoxal de sa démarche. Rare dans l’histoire du catholicisme et à contre-courant des préceptes dominants au Vatican. Comme si ce souverain pontife, peut-être davantage victime que maître de son image de conservateur, avait voulu adresser un pied de nez libérateur à la curie romaine…

Les exégètes jugeront. Sur l’actualité immédiate, les voies du Vatican sont suffisamment impénétrables pour imposer la prudence. Il est cependant une certitude. La modernité dont on gratifie aujourd’hui la démarche de Benoît XVI n’est pas une garantie, demain, de modernisation de l’Eglise.

La reconnaissance d’une certaine forme de limite d’âge peut, certes, faire partiellement jurisprudence. Les 118 cardinaux appelés, dans les prochaines semaines, à élire le nouveau pape, eux-mêmes soumis à une déchéance du droit de vote une fois atteints les 80 ans, seront sans doute tentés de ne pas désigner le plus âgé d’entre eux. Mais, d’une part, rien ne dit que le successeur de Benoît XVI, même diminué physiquement, aura les mêmes scrupules à s’accrocher au pouvoir. Et surtout, le jeune âge d’un prétendant ou, le cas échéant, son origine extra-européenne ne sont pas en soi une promesse d’ouverture à la modernité.

De quel leader l’Eglise catholique a-t-elle besoin ? Malgré les dénégations des défenseurs de l’oeuvre théologique du souverain pontife sortant, malgré la valeur relative de son bilan à la tête d’une institution affaiblie en Europe par la sécularisation mais prospère en Amérique latine et en Afrique, Benoît XVI aura été, à l’aune de l’Histoire de l’Eglise, un pape de transition. Dans la continuité de Jean-Paul II et sans empreinte pastorale novatrice parce que trop affairé sans doute à répondre aux scandales de pédophilie. Est-il venu le temps d’un guide qui apporte un souffle nouveau à l’Eglise catholique ? Si tant est que ce soit effectivement le voeu d’une majorité de fidèles, hors de toute vision européocentriste, les conditions de l’élection du futur successeur de saint Pierre ne semblent pas prédisposer à pareille issue. Jean-Paul II, puis Benoît XVI lui-même, ont assuré la domination des conservateurs au sein du conclave en nommant nombre de cardinaux acquis à leur sensibilité.

Pour autant, est-il illusoire d’imaginer un jour une Eglise catholique qui, tout en affirmant ses valeurs, serait moins dogmatique, plus à l’écoute des autres et de la société et davantage encline à se remettre en question ? Bref, une Eglise qui bannirait le repli sur soi et ferait enfin sienne le slogan « N’ayez pas peur » ?

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