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Défense: des experts pointent les problèmes (et proposent des solutions)

Des experts ont dressé mercredi après-midi un tableau plutôt sombre de l’état de l’armée belge, et en particulier de sa composante Terre, réduite à deux brigades et dépourvue de matériel lourd, tout en proposant des solutions pour tenter de compenser les économies qui frappent la Défense.

Avec un niveau des dépenses de défense réduit à 0,5% du Produit intérieur brut (PIB) en 2019 selon les prévisions actuelles, alors que l’Otan réclame deux pour cent, il n’est plus possible d’investir dans le renouvellement des équipements – dont une bonne partie arrivera en fin de vie au cours de la prochaine décennie – ni de participer à des opérations à l’étranger, a résumé le général de brigade à la retraite Jo Coelmont, devenu chercheur à l’institut Egmont. Il s’exprimait devant la commission de la défense de la Chambre, qui a entamé des auditions sur l’avenir de l’armée belge, alors que le ministre de la Défense, Steven Vandeput, prépare pour le printemps un « plan stratégique à dix ans ».

L’ex-général a dès lors plaidé pour la création de lignes budgétaires séparées, non soumises aux règles du pacte de stabilité européen, pour financer l’acquisition de matériel militaire (une option déjà évoquée pour l’achat de nouveaux avions de combat pour remplacer les F-16 vieillissants) voire la participation à des opérations militaires.

Le professeur Alexander Mattelaer, de la VUB, a pour sa part proposé le lancement d' »obligations de défense », à l’image des « War Bonds » émis par les Etats-Unis durant la Seconde Guerre mondiale pour financer leur effort de guerre, pour l’acquisition de matériel militaire. Une telle souscription, au faible taux d’intérêt actuellement en vigueur, aurait aussi pour avantage de rapprocher l’armée des citoyens, a-t-il expliqué, inquiet de la fracture grandissante entre les forces armées et la société.

Le politologue Joseph Henrotin, professeur au Centre d’analyse et de prévision des risques internationaux (CAPRI) à Paris, a pour sa part évoqué un « effondrement capacitaire » de l’armée belge, en mettant en exergue le cas de la composante Terre.

« Aujourd’hui, la puissance de feu de la composante Terre (qui ne dispose plus que de quelques canons et de mortiers (…) est inférieure à celle d’un Etat comme l’Estonie (1,32 million d’habitants) », a-t-il relevé.

Il a rappelé que l’armée belge ne comptait plus que deux brigades (l’une médiane et l’autre légère), ce qui réduit les options en opérations extérieures à des fonctions de soutien au sens large ou de « force protection », d’autant plus que les budgets d’entrainement sont également victimes des réductions budgétaires.

En 2013, la Belgique avait un budget militaire équivalent à celui du Portugal (pour un PIB supérieur), avec des capacités moindres sauf au plan aérien, mais avec des déploiements extérieurs plus nombreux, a rappelé le professeur Henrotin.

André Dumoulin, professeur à l’université de Liège (Ulg) et à l’Institut royal supérieur de Défense (IRSD, dépendant du ministère de la Défense) a quant à lui déploré que les amaigrissements successifs subis par les forces armées depuis la fin de la Guerre froide « avaient davantage pour objet de répondre aux contraintes budgétaires que d’être la résultante d’une réflexion de fond assumée ».

Il a souligné que la Belgique avait, en tant que membre fondateur historique de l’Union européenne et de l’Otan, la responsabilité de prendre en compte les conclusions des décisions prises dans le cadre de sommets des chefs d’Etat et de gouvernement de ces deux organisations.

Lors de leur dernier sommet, en septembre dernier au Pays de Galles, les dirigeants de l’Otan ont convenu, de « cesser toute diminution des dépenses de défense » et de « chercher à se rapprocher dans les dix années à venir (soit d’ici 2014, ndlr) des 2% recommandés » depuis plusieurs années. Un mois plus tard, le gouvernement Michel 1er décidait de réduire de 220 millions le budget de la Défense pour 2015 et d’imposer à ce département une économie d’1,5 milliard sur la durée de la législature.

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