Thierry Fiorilli

Déclin d’empire, boulevard de l’Empereur

Thierry Fiorilli Journaliste

Là, ce parti a les allures de Rome, juste avant sa chute. L’empereur est toujours en place, mais les barbares pillent, attaquent, avancent et s’étendent ; le pouvoir et l’influence s’étiolent ; les alliés se distancient ou se retournent ; les sénateurs vieillissent ; les légions fatiguent. Et donc, l’empire, si vaste, si long, se délite.

Rien ne garantit que, dans un peu plus d’un an, les élections (fédérales et régionales) sonneront le glas du PS, à la façon dont Odoacre, en 476, déposa Romulus Augustule, marquant la fin de l’empire romain d’Occident. Mais tout est en place pour faire du parti du Premier ministre un titan sur le point de s’effondrer : mauvais sondages, adversaires traditionnels avec grand vent en poupe, nouveaux ennemis sortis de nulle part, gros soucis d’effectifs internes, fidèles de longue date prêts à trahir, usure du pouvoir, pléthore de fronts, stratégie floue, pratiques dépassées….

Le lot de tous les empereurs. Qui terminent isolés, menacés de partout. Et avec le soleil qui finit toujours par se coucher sur leur territoire, le brûlant au passage.

Ainsi du Parti socialiste, actuellement. Il dirige, via l’un des siens, le gouvernement fédéral (après un quart de siècle de participation à l’exécutif, sans interruption), celui des deux Régions francophones (Bruxelles et Wallonie) et celui des deux Communautés sudistes (française et germanophone) ; derrière Elio Di Rupo, les rangs des ténors s’éclaircissent (Michel Daerden est mort, Philippe Moureaux est hors jeu, Charles Picqué se retire, Rudy Demotte déçoit, Laurette Onkelinx plafonne) ; hors Paul Magnette, la relève semble discrète, avec peu de réelle vision et/ou d’envergure ; le MR gagne la bataille de Bruxelles et peut raisonnablement envisager de réaliser le rêve de Didier Reynders – faire basculer le centre de gravité en Wallonie (gouverner sans les socialistes) ; le CDH de Benoît Lutgen s’affranchit de Di Rupo, auquel le CDH de Joëlle Milquet était inféodé ; Ecolo (on l’a vu à Molenbeek) va au plus offrant ; le PTB vient manger sur les plates-bandes du PS ; la FGTB est en instance de divorce d’avec son parti-coupole ; la N-VA (l’Attila de Belgique) ligue la Flandre davantage contre le PS que contre les francophones ; et la crise économique et sociale, avec les mesures d’économies drastiques qu’elle a causées, fait le reste.

On sera fixé sur le sort du PS au printemps de l’an prochain, sauf imprévu. L’envoi en première ligne de Magnette, comme président du parti et bourgmestre de la ville la plus emblématique du « mal wallon » (et singulièrement socialiste) démontre que la gravité de la situation a été bien perçue par Elio Di Rupo. Et son expérience des guerres peut encore lui permettre de retourner la situation en sa faveur, comme il l’a fait en 2010. Mais l’empereur est bel et bien de plus en plus seul en son palais, comptant ses troupes et déplaçant des drapeaux et des pions sur la carte de son empire. Et les Wisigoths, les Vandales, les Burgondes et les Francs dévastent les contrées annexées avant de mettre le cap sur la Ville Eternelle avec un même et unique objectif : l’incendier. Et éliminer son maître.

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