© Image Globe/Tom Ghiesmans

Décès de Jean-Pierre Detremmerie: « Il a grandement contribué au développement économique et social de Mouscron »

L’ancien bourgmestre cdH de Mouscron Jean-Pierre Detremmerie, 75 ans, a mis fin à ses jours dans la nuit de samedi à dimanche, a indiqué l’actuel bourgmestre de la commune, Alfred Gadenne. Hommages et retour sur sa riche carrière politique.

Selon le parquet, qui a confirmé l’information, M. Detremmerie a mis fin à ses jours par pendaison. « Il n’y aucun élément suspect et étant donné qu’il s’agit d’un fait de vie privée, aucun autre commentaire ne sera donné », a précisé le procureur du Roi de l’arrondissement Tournai-Mons, Christian Henry.

Celui qui a été bourgmestre de Mouscron de 1980 à 2006 allait être fixé sur son sort mardi au sujet d’un renvoi ou non en correctionnelle sur l’affaire des finances occultes de l’Excelsior, club de football qu’il a présidé durant de longues années. Il était inculpé de faux, usage de faux et d’abus de biens sociaux.

Les funérailles auront lieu mardi à 10h à l’église de la Coquinie à Mouscron. Ironie du sort, la Chambre du conseil de Tournai rendra au même moment son ordonnance de renvoi devant le tribunal dans l’affaire des finances occultes de l’Excelsior de Mouscron.

« Exigeant avec les autres mais aussi avec lui-même »

Le bourgmestre actuel de Mouscron, Alfred Gadenne (cdH) était le plus vieux compagnon de route de Jean-Pierre Detremmerie. C’est ce dernier qui est allé chercher le fils de l’ancien bourgmestre de Luingne pour en faire son premier échevin. « Nous avons travaillé vingt-cinq ans ensemble. Avec lui, il fallait travailler dur et avoir des résultats. Il était très exigeant avec les autres mais aussi avec lui-même. J’ai été marqué par sa volonté, sa détermination et son courage », dit-il. Les deux hommes avaient coupé les ponts quand le cdH avait décidé de se séparer de l’ancien bourgmestre, suite à l’affaire du Sarma (un litige sur l’affectation du produit de la vente d’un immeuble), en 2009.

« Il a grandement contribué au développement économique et social de Mouscron »

L’ex-député « laisse le souvenir d’un homme entièrement requis par sa tâche, dévoué à la cause de sa ville et de ses habitants », a réagi le cdH. « Doté d’une volonté de fer, à la fois très entreprenant et proche de ses concitoyens, il a grandement contribué au développement économique et social de Mouscron. Il incarnait Mouscron », a souligné le président des centristes, Benoït Lutgen, dans un hommage appuyé.

« Pendant 26 ans, jusqu’aux élections de 2006, après lesquelles il a cédé son mayorat à Alfred Gadenne, Jean-Pierre Detremmerie assura avec autorité le leadership de sa ville. Il l’a transformée en une cité dynamique et performante, en y attirant de nombreuses entreprises, à l’image du club de football, l’Excelsior, sa seconde passion, débordante, qu’il amena en division 1 », se souvient le parti.

« Jean-Pierre Detremmerie faisait preuve d’une ardeur communicative, d’une force de travail exemplaire et d’une grande générosité. Il a aidé personnellement beaucoup de personnes, animé par une foi chrétienne qui lui servait de moteur », a encore relevé M. Lutgen.

« Tous les responsables politiques du cdH qui sont au service de leurs concitoyens aujourd’hui à Mouscron savent ce qu’ils doivent à Jean-Pierre Detremmerie. A ‘Detrem’, comme les Mouscronnois l’appelaient. Tous les Mouscronnois », a-t-il insisté bien que M Detremmerie, rattrapé par certaines affaires à la fin de son mandat avait été exclu par ses pairs.

« Le dialogue était souvent musclé,mais toujours dans le respect »

Du côté du PS, la députée wallonne et sénatrice Christiane Vienne rend hommage « à un homme qui a incarné Mouscron tout le long de sa carrière ». L’ancienne ministre se souvient que Jean-Pierre Detremmerie l’avait appelée quand elle est entrée dans l’exécutif wallon « pour voir ce qu’on pouvait faire pour Mouscron ». Elle a aussi siégé au sein du conseil d’administration de l’Intercommunale d’Etude et de Gestion (IEG) quand Detrem’ était à la présidence, entre 2006 et 2009. « Il avait la volonté de mener un projet et d’imposer sa volonté. C’est Jean-Pierre Detremmerie qui a mené un combat pour l’emploi à Mouscron et qui a ramené toutes les entreprises, il avait beaucoup de dynamisme ».

L’actuel échevin en charge du Personnel, Marc Castel (MR), a commencé sa carrière au sein du PSC en compagnie de Jean-Pierre Detremmerie avant de l’affronter ensuite depuis l’opposition. « Il avait beaucoup de charisme et il supportait mal l’opposition au sein de son propre parti. C’était plus facile quand je suis parti dans l’opposition car il respectait l’opposition, le dialogue était souvent musclé mais c’était toujours dans le respect ». Marc Castel rappelle que c’est Jean-Pierre Detremmerie qui a placé Mouscron sur la carte, « c’était un gros travailleur qui se battait pour sa ville mais, hélas, il a été victime d’un mélange des genres ».

Un mélange des genres qui a été sans cesse critiqué par Jean-Marc De Mullier, ancien conseiller communal Ecolo. « Il avait un projet politique pour Mouscron qui n’était pas tout à fait le nôtre. Dès lors, on s’est engueulé, battu mais j’avais un très grand respect pour lui car il connaissait ses dossiers et c’était un homme intelligent qui acceptait le débat ». Celui qui milite toujours chez les verts se souvient aussi d’un homme « qui savait faire preuve d’une grande humanité » car « il savait être près de ses concitoyens qui étaient en grande difficulté ».

Tous nos interlocuteurs ont été choqués d’apprendre que Jean-Pierre Detremmerie avait mis fin à ses jours. « C’est terrible. En finir ainsi, c’est vraiment qu’il n’avait plus aucun espoir. Sur le plan humain, c’est terrible », note Christiane Vienne.

Son parcours

L’ancien parlementaire Jean-Pierre Detremmerie a incarné la ville de Mouscron qu’il a dirigée comme bourgmestre pendant un quart de siècle. Après une riche carrière politique, l’ex-député social-chrétien, rattrapé par un certain nombre d’affaires, a fini par être exclu du cdH local. Acteur d’une certaine redynamisation de la ville de Mouscron et du Hainaut occidental, il avait participé à la saga de l’Excelsior Mouscron, modeste club de football, qui, en tutoyant un temps les plus grands a servi de vitrine à ses ambitions politiques. Inculpé de faux, usage de faux et d’abus de biens sociaux dans l’affaire des finances occultes du club failli qu’il avait présidé, il allait être fixé mardi sur son sort quant à un éventuel renvoi devant le tribunal correctionnel. Il restait présumé innocent.

C’est le 1er janvier 1980 que l’échevin Jean-Pierre Detremmerie devient bourgmestre de Mouscron. Un an plus tard, il prend également la place du député Robert Devos à la Chambre des représentants alors qu’il était suppléant. Il s’impose comme le leader du PSC dans le Hainaut occidental, étant régulièrement réélu durant une vingtaine d’années. Jean-Pierre Detremmerie réorganise une partie des intercommunales hennuyères au profit de Mouscron, Commines-Warneton et des environs. Il parvient à capter d’importants investissements industriels et attire dans la région les aides de l’Objectif I. Forte personnalité, il n’hésite pas à contester la tutelle wallonne ou à quereller les accords de pacification communautaire qui voient les Fourons sacrifiés par les partis francophones (au profit de la création de la Région bruxelloise) alors que Comines se voit attribuer un statut linguistique spécial protégeant la minorité flamande.

Partisan d’un « unionisme belge », Jean-Pierre Detremmerie siège également jusqu’en 1995 au Parlement wallon et au Conseil de la Communauté française. En 1995, il revient à la Chambre où il est réélu en 1999. Après que les circonscriptions électorales ont été réformées pour épouser l’espace provincial, Jean-Pierre Detremmerie bute sur sa réélection en 2003 et rebondit dès lors l’année suivante au Parlement wallon où les circonscriptions sont restées plus modestes. Il y sera remplacé un an plus tard par feu Damien Yzerbyt en qui il voit son successeur à Mouscron.

L’étoile de Jean-Pierre Detremmerie commence à pâlir alors qu’il est rattrapé par un certain nombre d’affaires qu’il a toujours contestées. En 2005, il renonce à la présidence de l’Excelsior Mouscron, également sur le déclin après dix ans de participation à la première division de football, quelques places d’honneur, deux finales de coupe de Belgique et autant de participations en coupe d’Europe. Le matricule du club finira par être radié, le Royal Mouscron Peruwelz, étant aujourd’hui ramené à des ambitions plus modestes en fond de classement de la première division.

Alfred Gadenne s’impose en 2006 comme nouveau bourgmestre de la ville. Pour la première fois depuis qu’il y siège en 1971, M. Detremmerie se retrouve conseiller communal indépendant de l’opposition après son exclusion par le cdH local. Il est forcé de quitter en 2009 la présidence de l’Intercommunale d’Etude et de Gestion (IEG). « J’étais assis sur le coffre-fort », avait pour habitude de dire l’ancien bourgmestre qui, de cette façon, comptait encore tirer les ficelles. Il siègera encore au conseil communal jusqu’en 2009, année durant laquelle il a décidé de quitter définitivement la vie politique pour se consacrer à sa famille.

Contenu partenaire