Thierry Fiorilli

Début de crash test pour la N-VA

Thierry Fiorilli Journaliste

C’est peut-être déjà comme dans les passions, quelque temps après le coup de foudre. On vit toujours ensemble, on n’est pas fâché de se réveiller côte à côte, on partage encore les projets mais le feu brûle moins fort, moins haut et moins souvent.

Plus tard, restera la tendresse. Ou peut-être que surviendra la rupture. La N-VA semble en être là. Après leur triomphe aux législatives de juin 2010 (28 % à la Chambre, 31 % au Sénat, premier parti du pays), les nationalistes flamands restent selon tous les sondages d’intentions de vote confortablement installés à leur première place, mais il y a autour d’eux comme un air de fin d’état de grâce. Normal : l’amour ne durerait que trois ans, considèrent les experts en sentiments.

Et l’épreuve du pouvoir, pour un homme, une femme ou une formation politique, prend régulièrement l’allure du temps qui userait jusqu’aux couples les plus épris, les plus soudés. A un an des importantissimes élections fédérales, régionales et européennes, la N-VA aurait ainsi commencé à décevoir : moins 7 % d’électeurs favorables. Elle commencerait aussi à agacer : l’un de ses barons assène que l’autonomie de la Flandre reste la priorité, un autre prétend que le confédéralisme est plus important, un troisième dit qu’on verra bien, un quatrième voudrait surtout son bâton de maréchal. Elle ne flamboie pas au sein du gouvernement flamand, ses ministres apparaissant la plupart du temps peu en pointe, plutôt calés dans la roue de Kris Peeters, l’homme fort du CD&V. Et à Anvers, pilotée par Bart De Wever en personne, les polémiques et les stratégies donnent l’impression d’avoir occupé davantage d’espace dans « la vitrine du changement » que les politiques réellement nouvelles.

Les nationalistes devraient pourtant demeurer incontournables, dès après le scrutin du 25 mai 2014, pour la formation et la direction du prochain gouvernement régional flamand (leur objectif avoué). Or, la 6e réforme de l’Etat, en cours, et l’évolution institutionnelle inexorable du pays mènent à toujours plus de compétences régionales, donc de pouvoirs. Même dans un costume élimé de prince charmant, ou dans les habits d’un ex-superhéros, De Wever – l’incarnation de la N-VA – règnera sur la Flandre. Mais il aura à affronter, auparavant, et en plus de la gestion de la première ville de Flandre, deux gros défis : poursuivre sans erreur fatale sa campagne électorale et réussir son premier authentique crash test (sa résistance aux attaques, aux revers de fortune, aux caprices des électeurs, aux pièges des adversaires).

Cela, dans un climat de morosité, de colères et de rejets en tous sens de plus en plus répandu à tous les étages de la société. Avec, côté francophone, un PS de moins en moins vigoureux, un MR de plus en plus sûr de lui, un PTB et un PP qui devraient attirer les voix de beaucoup de déçus ; une Europe qui recueille toujours plus d’hostilité ; et une fonction royale fragilisée (par les rumeurs d’abdication d’Albert II, les inquiétudes toujours suscitées par Philippe et le débat annoncé sur la réforme des pouvoirs du Roi).
Tous les ingrédients sont réunis pour que l’année qui nous sépare de « la mère de toutes les élections » soit échevelée. Comme toujours, lorsqu’il est question d’amour et de désamours. Qui a dit que la politique n’est pas passionnante chez nous ?

THIERRY FIORILLI

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