Olivier Mouton

De Wever et le PS dans un jeu de dupes préélectoral

Olivier Mouton Journaliste

Le président de la N-VA n’est « candidat à rien ». Le Premier ministre se cache. Et le débat N-VA – PS n’est pas le seul auquel l’électeur a droit.

La campagne électorale en vue des élections du 25 mai a démarré sur les chapeaux de roue. Sous forme de jeu de dupes.
Cette semaine, la N-VA occupe le terrain. Avant son congrès programmatique du week-end, le parti nationaliste a présenté ses têtes de liste et monopolisé le champ médiatique. Sans surprise, son président, Bart De Wever, tirera la liste pour la Chambre dans la province d’Anvers. Enorme faiseur de voix, le bourgmestre d’Anvers devrait garantir un score monstre à la N-VA dans cet arrondissement clé.

Pour autant, il a annoncé mercredi qu’il ne serait « candidat à rien ». Voilà qui a le mérite de la clarté. En d’autres termes, il privilégierait le maïorat d’Anvers comme il s’y était engagé devant les électeurs lors des communales de 2012. Fort bien… Mais alors, pourquoi se présenter en tant que tête de liste « pour du beurre », si l’on considère que la N-VA fait de la politique « autrement » que les partis traditionnels ?

Le choix de Bart De Wever pourrait être aussi une stratégie : ne pas mettre la barre trop haut pour éviter toute déconvenue personnelle si la N-VA n’atteignait pas l’objectif des 30 % qu’elle s’est fixée. Là encore, sauf à se préserver soi-même, quelle est la cohérence de répéter sans cesse que la N-VA « veut participer au gouvernement fédéral » tout en tirant d’avance l’échelle?

Dit autrement : Bart De Wever aurait été politiquement plus clair en se déclarant candidat Premier ministre.

Mais ce ne serait pas le seul jeu de dupes auquel participerait Bart De Wever. En début de semaine, il se disait que la RTBF organiserait en mars un face-à-face entre le président de la N-VA et son homologue du PS, Paul Magnette. La N-VA aurait espéré, et l’électeur y aurait droit, que ce débat soit organisé avec le Premier ministre ,Elio Di Rupo, les deux ténors ne cessant d’affirmer que leurs modèles s’opposent. Pour rappel, Paul Magnette n’est pour l’heure… que président intérimaire du PS.

En outre, s’il est démocratiquement sain que N-VA et PS échangent leurs arguments, il serait par contre incompréhensible que la campagne démarre par cette opposition-là. Elle ne ferait que renforcer les deux forces antagonistes en présence. En d’autres termes, cette opposition ferait le jeu de la com’ de la N-VA et du PS, rien d’autre. Comme le soulignait sur Twitter le chroniqueur Luc Delfosse, cela donnerait l’impression d’avoir en Flandre et en Wallonie… des partis uniques. La RTBf a estimé en tout cas qu’il « était prématuré » de parler de la tenue éventuelle de ce débat.

Le MR hurle à la mainmise du PS sur la RTBF, le CDH regrette que l’on mette constamment la N-VA au centre du jeu. A vrai dire, tous deux n’ont pas tort. Le vrai choix que l’électeur francophone aura à poser en mai prochain n’oppose pas le PS et la N-VA mais bien plusieurs formations politiques dans un jeu à la proportionnelle : PS, MR, CDH, Ecolo, FDF, PTB-GO, PP… C’est évidemment plus complexe à décoder, mais tel est le vrai enjeu démocratique de ces élections.

Quitte à le simplifier, le vrai choix francophone sera de renouveler l’Olivier du côté wallon et bruxellois ou de donner d’autres impulsions en vue d’une majorité plus à droite voire d’un tripartite. Paul Magnette a déjà dit sa volonté de voir un Olivier naître au fédéral, si c’est possible en Flandre : un autre jeu de dupes quand on sait la configuration politique au nord du pays.

A force de prendre les électeurs pour des idiots, les partis risquent de nourrir un vent qui gronde parmi les citoyens : l’expression d’un antipolitisme dont les expressions pourraient être diverses. Le jeu de dupes, alors, se retournerait contre eux. Et l’ironie de cette histoire, c’est que Bart De Wever pourrait encore en tirer profit dans sa volonté de bloquer le pays…

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