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De Clerck appelle à « oublier » le passé de la collaboration

Le ministre de la Justice Stefaan De Clerck a appelé dimanche à aborder la question de l’amnistie des collaborateurs de la seconde guerre mondiale en adulte et peut-être se montrer prêt « à oublier, parce que c’est du passé ».

« A un certain moment, on doit être adulte et prêt à en discuter. Et peut-être aussi à oublier, parce que c’est du passé. C’est nécessaire pour rétablir une société », a indiqué dimanche le ministre de la Justice Stefaan De Clerck sur La Une (RTBF). « Il y a une législation internationale, universelle, qui n’accepte plus la prescription pour tous les crimes contre l’humanité. Il faut en discuter au parlement de manière sereine et en toute transparence. Il faut un débat sans nationalisme, en-dehors de l’émotionnel. Il faut comprendre un passé et travailler à notre avenir », a encore dit le ministre.

La prise en considération jeudi au Sénat d’une proposition de loi du Vlaams Belang visant à amnistier les inciviques de la Seconde Guerre mondiale a divisé élus flamands et francophones, Groen! étant le seul parti du nord du pays à refuser d’appuyer par ses voix la recevabilité du texte.

La CGSP-Défense s’indigne

La CGSP-Défense s’est indignée dans un communiqué des propos tenus par le ministre de la Justice. « Chaque jour, de nombreuses organisations se battent pour que, justement, on n’oublie pas ce qui s’est passé », a rappelé le syndicat socialiste, s’offusquant de cet appel à faire table rase du passé puisse être lancé « par un ministre fédéral, censé être un représentant du peuple ».

« Non, monsieur De Clerck, ce n’est pas se comporter en adulte que tout faire pour oublier. Nous imaginons avec quelle douleur celles et ceux qui ont été victimes des atrocités de ces collaborateurs d’hier auront accueilli ce message inacceptable. Il nous faut préserver le ‘Devoir de Mémoire’ pour que les prochaines déclarations ne soient pas l’affirmation de l’inexistence des victimes », a encore exprimé la CGSP-Défense.

Aberrant et scandaleux, digne du VB


Oublier les actes des inciviques commis durant la Seconde Guerre mondiale, est « aberrant et scandaleux », a réagi le chef de groupe PS au Sénat Philippe Mahoux. Ce faisant, « il se range aux thèses défendues par le Vlaams Belang », a-t-il encore commenté.

« Entendre dire de la part d’un ministre de la Justice, censé savoir que ce qui a été jugé appartient à la vérité judiciaire, qu’il faudrait pouvoir remettre en question des condamnations pour collaboration, c’est aberrant et scandaleux », a fulminé dimanche Philippe Mahoux. « Depuis jeudi,lorsque nous avons mis au jour cette proposition du Vlaams Belang, certains ont décidé de ranimer la confusion entre collaborateurs et résistants, et parmi les collaborateurs, nombreux ont été ceux qui ont livré des résistants, c’est abject », a dénoncé le sénateur.

« Ce qui sous-tend la proposition du Vlaams Belang, parti d’extrême droite, à l’origine du débat, c’est le négationnisme de l’existence de la collaboration. C’est autre chose que de s’intéresser à quelques cas individuels qui subissent les conséquences liées à un passé familial », a expliqué l’élu PS.

Pour le président du FDF Olivier Maingain, si le gouvernement n’était pas en affaires courantes, il faudrait à tout le moins un débat sur le maintien de Stefaan De Clerck. « Venant d’un ministre de la Justice, gardien du droit, ces déclarations sont aberrantes », a dit M. Maingain lundi sur La Première. « Si nous étions avec un gouvernement de plein exercice, il faudra poser la question de sa responsabilité. Si nous n’étions pas en affaires courantes, nous devrions à tout le moins avoir un débat sur son maintien dans sa fonction », a-t-il ajouté.

M. Maingain a insisté sur le fait qu’une amnistie générale était inacceptable pour lui et il a rappelé que la loi Vermeylen, toujours en vigueur, permet à ceux qui acceptent de reconnaître qu’ils ont commis une erreur d’obtenir le pardon.

Le président du FDF a par ailleurs aussi répété ce qu’il avait déjà dit dimanche. Interrogé alors sur la prise en considération d’une proposition de loi du Vlaams Belang sur l’amnistie, il a dit être d’avis qu’une partie du monde politique flamand bascule hors du champ de la démocratie.

Quant à savoir si ce dernier épisode aura de l’influence sur les discussions en vue de la formation d’un gouvernement et d’une réforme de l’Etat, M. Maingain a souligné lundi qu’il fallait clairement se poser la question de savoir s’il y a encore « une volonté commune de respecter les valeurs démocratiques essentielles ». Et d’ajouter: « je commence à en douter ».

Il n’est pas question d’oublier

Le président de l’Open Vld Alexander De Croo n’est pas d’accord avec les déclarations du ministre de la Justice. « On ne peut pas oublier le passé, certainement pas dans ce domaine », dit-il.

Les libéraux flamands ont aussi voté en faveur de la prise en considération. Toutefois, leur président a pris ses distances avec les déclarations du ministre. « Je ne suis pas De Clerck. Notre but, en acceptant la prise en considération de la proposition relative à l’amnistie, est d’avoir un débat adulte. Mais oublier? Jamais », a-t-il envoyé via Twitter.

« Nos avis divergent manifestement sur ce point », a commenté M. De Croo à Belga. Celui-ci refuse de mener le débat sur l’amnistie par presse interposée mais il se veut très clair. Pour lui, oublier la collaboration n’est pas une option. « Tel a toujours été notre point de vue. Mais on doit pouvoir en parler », a-t-il ajouté.

Le Vif.be, avec Belga

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