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Comment le MR s’est rendu indésirable

François Brabant
François Brabant Journaliste politique au Vif/L'Express

L’attitude des libéraux pendant la campagne électorale a été jugée inutilement agressive par les socialistes. Et les vieux réflexes d’alliance laïque, qui rapprochaient par le passé PS et MR, n’ont plus la force d’antan.

Selon toute vraisemblance, la formation de Charles Michel devrait être exclue du pouvoir régional jusqu’en 2019, alors qu’elle végète déjà dans l’opposition depuis 2004. Qu’ont fait les libéraux francophones pour écoper d’une si lourde peine ? Comment se sont-ils retrouvés à ce point isolés dans le champ politique francophone ?

L’ostracisme dont souffrent les libéraux obéit sans doute à deux types de causes. Des éléments de circonstance, d’abord : manifestement, les leaders actuels du MR sont pour la plupart perçus par leurs adversaires comme inconstants et peu fiables. Une tare rédhibitoire dans le système proportionnel belge, où les acteurs politiques doivent à tout prix trouver des alliés au-delà de leur propre camp. A cette difficulté, vient s’ajouter une tendance de fond : si des atomes crochus ont pu exister par le passé entre socialistes et libéraux, ces liens se sont effilochés ces dernières années, au point de quasiment disparaître.

« Le MR doit s’interroger sur sa capacité de pouvoir fédérer autour de lui. Il a certainement des questions à se poser », indiquait Maxime Prévot au micro de la RTBF, quelques heures après l’annonce du préaccord PS-CDH-FDF. Que cette phrase émane du bourgmestre de Namur constitue, en soi, un fait révélateur : au sein du parti centriste, Prévot incarne une sensibilité de centre-droit, tout comme Melchior Wathelet et Catherine Fonck. En 2009, lors des discussions internes au CDH, il s’était d’ailleurs déclaré favorable à un gouvernement wallon sans les socialistes. Même lui, cependant, semble agacé par l’agressivité des discours libéraux.

Cette agressivité, d’autres mandataires de premier plan s’en sont plaints, ces derniers mois. En décembre 2013, Rudy Demotte faisait sensation en déclarant dans Le Soir : « Le MR se rend indésirable. » Quelques semaines plus tard, le ministre-président wallon réitérait son propos dans L’Avenir : « Quand je vois comment les libéraux s’attaquent à la Wallonie et comment ils perdent les accents sociaux qu’ils avaient jadis, ça ne me donne pas le sentiment qu’ils se rendent aujourd’hui désirables pour l’une des formations de l’olivier. » A la suite de Demotte, le ministre CDH André Antoine enfonçait le clou. « Oui, les libéraux se sont rendus indésirables », martelait-il sur le plateau de Mise au Point.

Des signaux de cette nature, il y en eut dix autres, au moins. Citons notamment l’interview du socialiste Jean-Charles Luperto au Vif/L’Express, en février. « Comme à chaque élection, le MR tombe dans l’agression permanente, regrettait alors le président du parlement de la Communauté française. Les libéraux dézinguent tous azimuts… Par le passé, cette attitude hyper agressive a souvent conduit Didier Reynders à l’isolement. D’autres reprennent maintenant le même schéma. C’est ce comportement qui isole le MR, pas ses idées. Parce que ses idées, on les connaît : on sait qu’elles ne sont pas toutes compatibles avec les nôtres, on sait aussi qu’on peut travailler ensemble, chacun avec ses opinions. »

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine :

les propos acides du MR depuis 2012 le bon vieux temps des « alliances laïques » comment le PS a enterré la Belgique (fédérale)

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