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Charles Michel aurait pu présenter son State of the Union à Tomorrowland

Stavros Kelepouris
Stavros Kelepouris Journaliste pour Knack.be

Cette fois, il n’y a pas eu de réunions nocturnes avant la déclaration de politique générale du gouvernement, car Michel a l’accord en poche depuis des mois. Un contraste étonnant par rapport à l’année passée, quand Kris Peeters avait dynamité les négociations en pleine nuit.

Ce mardi, le Premier ministre Charles Michel prononcera la déclaration de politique générale de son gouvernement. Il indiquera quels dossiers ont eu le feu vert du gouvernement et peuvent être traduits en textes de loi, et précisera les accents de l’année politique à venir.

Il y a un an, la magie de la concertation jusqu’à l’aube n’a pas réussi à surmonter les oppositions du gouvernement. Il avait fallu reporter le State of the Union en dernière minute parce que le vice-premier ministre Kris Peeters (CD&V) avait quitté la table des négociations en pleine nuit. Son parti voulait instaurer un impôt sur la plus-value, une traduction pratique de leur demande de « fiscalité juste ». Ce n’est qu’à cette condition que le parti donnerait son fiat pour la réforme de l’impôt sur les sociétés. Cette nuit-là, Kris Peeters ne reviendrait pas négocier.

Quelle différence par rapport à 2017. Les remous politiques les plus sérieux du week-end dernier proviennent d’une déclaration de la Secrétaire d’État à Lutte contre la Pauvreté Zuhal Demir (N-VA) qui a dû admettre que la Belgique n’arriverait pas mettre les indemnités au niveau du seuil européen d’ici la fin de la législature. « En 2,5 ans, cela n’ira pas », a-t-elle dit. L’opposition a exprimé son indignation, mais Demir ne disait que la vérité : sans creuser de nouveau trou budgétaire, personne n’arrivera à augmenter ces indemnités aussi rapidement. Il est vrai qu’elle a hérité cet échec de son prédécesseur et collègue Elke Sleurs.

Il y a eu très peu de bruit autour du State of the Union. Pas de concertation de dernière minute, pas de journalistes qui campent devant une porte fermée. Le Premier ministre Charles Michel a son accord en poche depuis longtemps – depuis le 26 février pour être précis, quand le gouvernement a sorti son fameux accord de l’été. Au fond, Michel aurait pu donner son State of the Union il y a 2,5 mois, sur la scène principale de Tomorrowland.

Hormis la polémique autour de la mission d’identification soudanaise, il n’y a plus eu de grande nouvelle au sujet de la politique gouvernementale. Les plus grands soucis semblaient concerner l’accord estival, en partie sous l’impulsion du récalcitrant ministre Johan Van Overtveldt (N-VA), qui semblait en faire un sport de douter de la taxe sur les comptes-titres – une autre traduction pratique de « justice fiscale », ainsi qu’une discussion « mais si – mais non » sur la réforme des pensions.

« Ce n’est pas parce que nous ne nous sommes pas disputé ce week-end qu’il n’y a pas eu de conflits », déclare Meryame Kitir, cheffe de groupe sp.a à la Chambre. « Outre la taxe sur les comptes-titres, le gouvernement s’est aussi chamaillé sur les pensions. Je suis curieux de voir ce que le Premier va appliquer et si ce sera porté par son équipe gouvernementale. »

Kristof Calvo, le chien de garde parlementaire écologiste, dénonce les projets de fiscalité juste du CD&V. Un an après la demande d’une taxe sur la plus-value, le parti se contente d’une taxe sur les comptes-titres au sujet de laquelle il y a beaucoup d’imprécisions. « À l’heure actuelle, le débat qui faisait rage l’année passée est tout sauf tranché. C’est toujours très tendu dans le ménage de Charles Michel. »

Les défis de Michel I dépassent l’agenda socio-économique. Quand Michel sortira son mantra ‘jobs, jobs, jobs’, la ministre Marie-Christine Marghem (MR) hochera la tête. « J’espère que le mot climat tombera dans ce State of The Union, et non dans l’expression ‘climat économique' », déclare Calvo. « Aujourd’hui, nous ne sommes absolument pas partis pour atteindre les objectifs européens. La génération actuelle de politiques risque de manquer son rendez-vous avec l’avenir. »

Quant au député Servais Verherstraeten (CD&V), il déborde encore d’ambition. Outre le pacte sur l’énergie, il voit beaucoup de marge d’amélioration à la SNCB et dans l’équilibre entre la famille et le travail. Mais lui aussi sait qu’en 2018 et 2019 il y aura de moins en moins de temps et de volonté politique pour terminer de grands dossiers. Le mode de campagne pour les élections communales règne déjà dans les bureaux de parti, et dans un an la politique belge se préparera pour les élections régionales et fédérales. « Le but n’est pas de se reposer sur les lauriers », déclare Verherstraeten. « Comme les élections parlementaires sont dans deux ans, nous ne pouvons pas nous permettre de nous relâcher. »

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