Didier Reynders. © Belga

Ces profs qui sont aussi des politiques

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Les parlements comptent de nombreux professeurs de l’enseignement supérieur. Certains n’ont pas renoncé à leur métier d’origine malgré leur mandat. Une tradition bien belge.

La déclaration de mandats, fonctions et professions des élus, rendue publique à l’été 2014, est riche… d’enseignements. De nombreux élus exercent une activité professionnelle dans l’enseignement supérieur, tous partis confondus, d’après un document consultable sur le site de la Cour des comptes. Une situation tout à fait légale. Il s’agit presque d’une tradition belge et rien n’empêche de « cumuler » ces deux fonctions, pas même un mandat électif. Philippe Moureaux ou Francis Delpérée, ou autrefois Guy Spitaels. Le phénomène existe aussi en Flandre, où l’on croise dans les auditoires Johan Vande Lanotte, Koen Geens ou John Crombez. En fait, il s’agit souvent d’enseignants du supérieur qui n’ont pas renoncé à leur poste malgré leur portefeuille ministériel ou leur siège de député. De fait, l’univers académique demeure un vivier où viennent puiser les partis. Pour d’autres, en revanche, c’est la notoriété qui leur a ouvert les portes des campus.

Parmi eux, il y a bien sûr les « vedettes ». Le ministre MR Didier Reynders est maître de conférences à HEC Liège et à l’UCL. Il y enseigne (en anglais) « Finances publiques et politique économique en Belgique et en Europe ». L’un de ses collègues n’est autre que Frédéric Daerden (PS), bourgmestre d’Herstal, réviseur d’entreprises, parlementaire européen jusqu’en juin dernier, depuis député fédéral, et lui aussi maître de conférence en droit commercial à l’ULg, tout comme son père, feu Michel Daerden. Quant à Melchior Wathelet (CDH), il donne également un cours d’introduction au droit à l’IHECS (sans être payé, puisque sa rémunération alimente un fonds appelé Sophie Soudan, en mémoire à l’une de ses étudiantes décédées d’un cancer). Autres professeurs VIP, la ministre bruxelloise CDH Céline Frémault, chargée de cours en droit public (depuis 2001) à l’Institut Cardijn, et Vincent De Wolf, député bruxellois MR, bourgmestre, à la tête d’un cabinet d’avocat, et assistant à l’ULB.

Ces stakhanovistes jurent s’en sortir avec leur emploi du temps. Chacun sa méthode : peu de sommeil, des journées à rallonge, un bon adjoint, un temps réduit à l’université ou en haute école. Il faut dire que la loi impose aux membres du corps académique de réduire leur charge de cours dans le cas d’une fonction extérieure trop prenante. Après, à chacun de gérer. « Je m’étais toujours fixé une limite : si je ne parvenais pas à donner mes cours de manière régulière, je laisserais tomber. Se faire remplacer une fois ou deux n’est pas un problème, mais je ne voulais pas en arriver à donner cinq heures de suite le samedi », déclare Didier Reynders qui a suspendu son activité académique lorsqu’elle n’était plus compatible avec sa vie politique. Paul Magnette (PS), alors professeur ordinaire en Sciences po à l’ULB avant d’entrer en politique et aujourd’hui ministre-président de la Région wallonne et maïeur de Charleroi a également renoncé cette année aux six heures de cours, intitulé « Exercices d’histoire de la pensée politique ». De même, la députée bruxelloise et communautaire, par ailleurs présidente de CPAS Françoise Bertieaux (MR), maître assistante à l’Ephec, s’est mise en congé politique pour se consacrer à 100 % à ses mandats électifs.

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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