« Certaines grandes banques souffrent toujours du même mal, comme l’illustre la Deutsche Bank »

ING supprime 3500 emplois en Belgique, et entre-temps la Deutsche Bank se débat dans les difficultés. Que se passe-t-il au pays des banques ?

Le secteur financier est-il le secteur sidérurgique du 21e siècle? Il y un mois, l’assureur AXA Belgique annonçait la suppression de 650 emplois au cours des deux années venir. Son concurrent P&V va supprimer 300 jobs sur 1750 et il y a quelques jours ING annonçait la disparition de 3500 postes sur 8100. Et ce n’est pas fini.

Depuis l’éclatement de la crise bancaire en 2008, une succession de malheurs s’abat sur le secteur financier. Pendant des années, les banques ont cru qu’elles pouvaient pratiquement tout se permettre. Animées par la folie des grandeurs et la cupidité, elles ont pris des risques inadmissibles qui ont entraîné la chute d’institutions financières glorieuses telles que Fortis. La crise financière a entraîné une crise économique qui a provoqué une stagnation de longue durée : presque pas de croissance, une inflation faible et des taux d’intérêt bas. Dans l’e-book « Secular Stagnation: Facts, Causes and Cures » (téléchargeable gratuitement sur VoxEU.org), certains grands économistes affirment même qu’une stagnation de longue durée remet tout notre modèle de société en cause.

La Banque centrale européenne (BCE) tente de relancer l’économie à l’aide d' »une politique monétaire souple » : on imprime de l’argent en grandes quantités et on le pompe dans l’économie. Du coup, les emprunts se font à un taux bon marché, ce qui doit inciter les consommateurs et les entreprises à consommer et à investir davantage, même si cela semble échouer. Entre-temps, les institutions financières se plaignent amèrement, car leur modèle d’entreprise est sous pression : traditionnellement, elles gagnent de l’argent en prêtant les avoirs d’épargne à court terme (par exemple les emprunts hypothécaires), mais comme les taux d’intérêt sont historiquement bas, elles y gagnent de moins en moins.

Nos confrères de Knack ont étudié les chiffres avant de conclure que les banques ont vécu leurs meilleures années. Elles réalisent toujours de beaux bénéfices grâce aux taux d’intérêt faibles et à d’autres revenus tels que les commissions sur la vente de placements et de fonds, les indemnités pour la gestion de fortune, les commissions sur les primes d’assurance et les recettes de transactions financières. Les bénéfices et la distribution de dividendes n’ont pas diminué, mais sans mesures ils seront également sous pression.

Ainsi, les banques aimeraient que le taux d’intérêt minimum de 0,11% sur les livrets d’épargne soit supprimé, de sorte qu’elles doivent verser encore moins d’intérêts. Entre-temps, elles comptent plus de frais pour toutes sortes de services bancaires. Et étudient s’il n’est pas possible d’avoir une organisation plus efficace avec moins de personnel. C’est ce que fait ING : la banque ferme la moitié du réseau d’agences belge et mise sur le banking numérique.

Comme si tout cela ne suffisait pas, le monde bancaire risque encore plus de catastrophes. Deutsche Bank suffoque, plein de gens retirent leur argent et le cours de la bourse s’effondre. Il y a quelques bonnes raisons à ça : la rentabilité de Deutsche Bank est pauvre, notamment à cause des taux d’intérêt faibles. En outre, elle doit payer une amende de plus de 14 milliards de dollars aux États-Unis pour la vente contestée de subprimes à l’approche de la crise financière de 2008. L’Allemagne trouvait cette amende beaucoup trop élevée, elle serait à présent réduite à 5,4 milliards d’euros.

La situation de Deutsche Bank illustre le fait que les grandes banques n’ont pas beaucoup changé depuis la crise bancaire. Elle possède un portefeuille de 42 000 milliards d’euros de produits dérivés, qui implique beaucoup d’autres institutions financières. Ce n’est pas pour rien si l’année dernière le FMI a qualifié la Deutsche Bank de banque systémique. Si la Deutsche Bank chavire, elle entraînera d’autres banques avec elle, ce qui peut déclencher une nouvelle crise bancaire et encore empirer la crise économique.

Oui, le secteur bancaire est le secteur sidérurgiste du 21u003csupu003eeu003c/supu003e siècle. Et nous sommes tous touchés.

Aujourd’hui, nous digérons toujours les conséquences de la crise financière dans laquelle le comportement imprudent des banques a plongé le monde il y a presque dix ans. Certaines grandes banques souffrent toujours du même mal, comme l’illustre Deutsche Bank. Tout cela disloque le secteur financier, avec des conséquences dévastatrices. Oui, le secteur bancaire est le secteur sidérurgiste du 21e siècle. Et nous sommes tous touchés.

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