François Brabant

Ce qui désunit le gouvernement Demotte, c’est la crise

François Brabant Journaliste politique au Vif/L'Express

Après trois semaines de cacophonie et six mois de tractations-hésitations, le gouvernement wallon est parvenu à un accord dans l’épineux dossier énergétique. Un nouveau système de soutien au photovoltaïque, baptisé « Qualiwatt », sera mis en oeuvre. Un accord de principe est également intervenu sur une tarification progressive de l’électricité, moyennant des aménagements pour les familles nombreuses ou les indépendants.

Bien. Pour autant, les tensions qui ont miné l’exécutif régional depuis le début de l’année 2013 sont-elles aplanies ? Non, bien sûr. Plus l’échéance électorale de 2014 se rapprochera, plus les noms d’oiseaux voleront, plus ce sera à couteaux tirés entre Jean-Marc Nollet et André Antoine, entre Jean-Claude Marcourt et Rudy Demotte, entre Philippe Henry et Dimitri Fourny, etc. Que du classique.

Comment expliquer ces déchirements internes à l’Olivier ? Certains accusent le manque de leadership du ministre-président Rudy Demotte, d’autres la raideur idéologique des écologistes, d’autres encore la déloyauté des députés PS et CDH vis-à-vis de la majorité qu’ils sont censés soutenir, ou le tempérament parfois buté des vice-présidents Antoine, Nollet et Marcourt. Rien de tout cela n’est complètement faux. Mais rien n’est complètement vrai non plus.

Ce qui cause les difficultés du gouvernement Demotte, c’est la crise, rien d’autre. Depuis 2009, la région a dû économiser 1,9 milliard d’euros. Pour la Fédération Wallonie-Bruxelles, le prix de la crise s’élève à 700 millions d’euros. Si on reporte ces chiffres au budget global des deux entités, autour de 15 milliards d’euros, on mesure l’effort gigantesque qui a été imposé à la tripartite PS-Ecolo-CDH.

Ce contexte change tout. Il complique l’aboutissement des dossiers, car les marges de négociation sont bien plus étroites qu’auparavant. Forcément, cela complique les relations entre les partenaires, et cela installe un climat de tension permanente au sein de la majorité. Pour les observateurs, ce spectacle est d’autant plus frappant qu’il contraste avec la situation politique qui a prévalu à la région depuis, quasiment, sa création. Le gouvernement wallon, à la différence du fédéral et de la Communauté française, a rarement dû affronter des budgets difficiles. Il a longtemps été un gouvernement « bonnes nouvelles ». Souvenons-nous : en 2009, le ministre du Budget, Michel Daerden, promettait encore de supprimer la télé-redevance. Le responsable politique qui proposerait un tel cadeau aujourd’hui passerait aussitôt pour un guignol.

Le gouvernement wallon souffre aussi de sa comparaison avec le gouvernement fédéral. Formée au bout d’un tunnel long de plus de 500 jours, la coalition cornaquée d’Elio Di Rupo conserve une aura quasi messianique. Elle existe, et c’est déjà beaucoup, même si les passes d’armes en son sein sont autrement plus féroces que celles qui secouent, de temps à autre, l’esquif piloté par Rudy Demotte.

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