© Frédéric Pauwels/Huma

Catherine Moureaux : « le traité budgétaire européen est imbuvable »

Les différents parlements belges s’apprêtent à ratifier le traité budgétaire européen. Simple vote de routine ? Pas sûr. Catherine Moureaux dénonce un texte qui contient en germe « la fin de notre modèle social ». La députée bruxelloise estime que le PS se trouve « face à une équation insoluble ».

Le Vif/L’Express : Le traité budgétaire européen devra être ratifié par la Belgique dans les prochaines semaines. Il sera soumis au vote dans les différents parlements du pays. Quelle sera votre position ?

Catherine Moureaux : Je sais déjà où mon coeur va. La raison, c’est autre chose… Ce traité est imbuvable, il signifie la fin de notre modèle social. Déjà, personnellement, je n’avais pas voté le Mécanisme européen de stabilité (MES), parce que ce texte induisait d’autres étapes, à mon avis très dangereuses.

Vous vous étiez abstenue lors du vote sur le MES ?

Je n’étais pas là lors du vote. Malheureusement, je n’ai pas pu y assister. (Sourire ironique.) Le nouveau traité confirme ce qu’on redoutait. La fameuse « règle d’or », qui interdit les déficits publics, c’est la mise sous couvercle de toute ambition des Etats. En obligeant les Etats à confectionner des budgets à l’équilibre, on les empêche d’investir. C’est un choix déraisonnable, complètement fou ! Pour n’importe quel projet un peu ambitieux, on devra se tourner vers le privé. Dans ces conditions, garder un Etat qui travaille au bien-être du plus grand nombre, cela devient impossible. Vraiment impossible !

Votre coeur s’est exprimé. Mais que fera votre raison, le jour du vote ?

On verra. C’est un peu tôt. Le groupe socialiste va y réfléchir.

Comment interprétez-vous la montée de l’extrême gauche lors des élections du 14 octobre ? Le discours du Parti socialiste, pendant la campagne, a-t-il manqué de clarté ?

Je ne sais pas si ce n’était pas clair. Les citoyens sont tellement loin qu’ils ne comprennent pas. A la limite, ça devient davantage une question de pédagogie que de stratégie électorale. Comment expliquer qu’un gouvernement dont fait partie le PS prenne de telles mesures ?

Tout au long de l’année 2012, les dirigeants socialistes ont multiplié les interventions pour expliquer que les réformes décidées par le gouvernement fédéral étaient indispensables. Visiblement, ça ne suffit pas.

Pourquoi ça ne suffit pas ? Parce que les mesures sont terribles, bien que le Parti socialiste se soit arc-bouté, Laurette Onkelinx en tête, pour qu’elles fassent le moins de dégâts possibles. Ces mesures, sur le terrain, elles sont terribles. Et ça ne va pas s’améliorer. On ne se rend pas encore compte de ce que ça va donner en 2015, quand les CPAS ne tiendront plus la route dans les communes bruxelloises. Cela va être horrible. L’inquiétude des citoyens est à l’aune des mesures prises. Ils ont tout à fait raison d’être inquiets. J’aimerais qu’ils manifestent leur inquiétude en s’engageant à nos côtés, mais s’ils le font en votant PTB, c’est tout à fait respectable. Il faut entendre ce signal.

Malgré tout, vous restez convaincue que le PS fait oeuvre utile, qu’il est à sa place au gouvernement fédéral ?

Ben oui. On a limité la casse.

A vous entendre, votre parti est confronté à une équation insoluble ?

Exactement. Par rapport aux autres pays d’Europe, on arrive à limiter la casse sur le plan social. Mais jusqu’à quand ? Et à quel prix ? Vous avez raison, c’est une équation insoluble. Je n’ai pas de réponse. On avance… Mais c’est très, très difficile. Je crois qu’au niveau européen, on doit avoir le courage de poser certains actes.

Entretien : François Brabant

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