Christine Laurent

Casting royal

Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

IL N’A ROULÉ POUR PERSONNE, IL VOULAIT JUSTE SAUVER son pays. Et il a bien mérité de la patrie. Même s’il en a vu de toutes les couleurs pendant ces 545 jours de crise, à aucun moment il n’a baissé les bras, animé à la fois, sans doute, par une forme de pessimisme joyeux et d’optimisme de la volonté.

Et là où il y a volonté, il y a un chemin, si sinueux soit-il. De ses états d’âme, nous ne saurons rien : le roi ne se confie pas. Reste l’action politique, bien visible celle-là. Officiellement, le rôle du souverain, selon le grand commis d’Etat André Molitor, est « d’aider à rendre possible ce qui est réalisable ». Albert II a fait bien davantage. « Le roi a accompli un parcours fantastique. Dans cette crise, il a lui-même beaucoup décidé. […] Le roi connaît ses dossiers et suit la situation politique de très près. […] On ne lui fait rien gober, vous savez », affirme le vice-Premier ministre Johan Vande Lanotte dans Johan Vande Lanotte. Dagboek van een politieke crisis (éditions De Bezige Bij Antwerpen). On se souvient encore du discours royal musclé pour le 21-Juillet quand les négociations coinçaient de toutes parts. Un coup de colère et d’indignation qui n’avait laissé personne indifférent. Au pays de l’indécision, embourbé dans un conflit institutionnel inextricable, le roi, roseau plus penché que penchant, a su renouer les fils avec astuce, accompagnant ainsi avec ténacité un nouveau destin pour la Belgique. Il s’imposait tout naturellement comme notre personnalité de l’année.

Dans notre palmarès 2011, on trouve aussi bien des perdants que des gagnants, des rebelles que des controversés, des infréquentables que des mal-aimés. Ainsi, au hasard, prenez Bart De Wever. Un personnage à l’avenir si prometteur il y a un an et aujourd’hui tout seul dans son coin. Certes, il tousse encore fort, il chahute, il grogne, il tente de donner de nouveaux coups de latte. Toujours la même stratégie. Celle de la mauvaise foi habillée dans des formules à l’emporte-pièce qui font mouche, du moins auprès de son fan-club. Mais même si l’ogre reste sur sa faim, il ne parvient plus à cannibaliser la vie politique du pays qui poursuit sa route sans lui. Il voulait « bousiller » la Belgique. C’est raté.

Exit donc le président de la N-VA et place au sauveur, Wouter Beke, celui qui a osé déscotcher le CD&V du parti des nationalistes ! Un parcours semé de mines antipersonnel dont il est sorti miraculeusement indemne. Et puis, il y a l’éternel rebelle, Olivier Maingain l’inflexible, celui qui persiste et signe, refuse de plier, réfractaire à tout appel du pied. Il lui en a fallu du courage à Charles Michel pour apporter son scalp à la table des négociations ! Ça passait ou ça cassait. Une tactique à haut risque mais qui a permis au MR d’intégrer le tant convoité nouveau gouvernement fédéral. Pour le pire ou le meilleur ?

Enfin, parmi les 100 personnalités choisies par Le Vif/L’Express cette semaine, épinglons le toujours très controversé président de l’Open VLD, Alexandre le bienheureux ou l’art de jouer avec le feu et les nerfs de ses partenaires. Celui-là même qui a non seulement débranché la prise et renvoyé Yves Leterme pendant plus d’un an aux affaires courantes, mais qui a montré, aussi, qu’il pouvait tenir tête au puissant patron du PS, Elio Di Rupo. Avec son « âme damnée », Vincent Van Quickenborne, dont on se méfie comme du diable du côté francophone, il entend bien marquer de son empreinte la politique gouvernementale. A ne pas quitter des yeux.

Christine Laurent

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