Dave Sinardet

Campagne présidentielle à Anvers

Les médias réduisent les communales anversoises à un duel entre Patrick Janssens et Bart De Wever.

La semaine passée, le bourgmestre d’Anvers Patrick Janssens fut l’invité de l’émission d’information Reyers Laat à la VRT pour parler des prochaines élections communales. Une équipe de reportage avait été envoyée dans les quartiers du nord de la ville pour sonder les électeurs issus de l’immigration. Les journalistes avaient emporté deux grandes photos, qu’ils trimbalaient dans les rues : l’une de Janssens, l’autre de De Wever. Sur les photos, on avait inscrit leurs prénoms : « Patrick » et « Bart ». Des passants furent priés de désigner qui des deux était le candidat de leur choix. Meyrem (Almaci), Annemie (Turtelboom), Filip (Dewinter), têtes de liste de respectivement Groen, Open VLD et Vlaams Belang, ne semblaient déjà plus être une option.

Le reportage est représentatif de la manière dont la plupart des médias réduisent les communales anversoises à un duel hautement personnalisé et polarisé entre Janssens et De Wever, digne d’une campagne présidentielle. Et ce n’est pas nouveau : quoique le président de la N-VA se soit déclaré officiellement candidat au mayorat voici quelques semaines seulement, son duel à Anvers avec Janssens en 2012 avait déjà été évoqué maintes fois au cours des deux années passées. Les médias anversois (la chaîne de télévision ATV, le quotidien Gazet van Antwerpen…) accordent volontiers plus d’importance à un éventail politique plus large et mettent aussi davantage l’accent sur les idées et les options politiques que les partis inscrivent dans leurs programmes. Cela ne les empêche toutefois pas de voguer, eux aussi, fût-ce avec une certaine retenue, sur la dynamique créée par le duel. En plus, en pleine campagne, VTM diffusera une série de fiction dont les communales à Anvers apparaîtront en arrière-fond. Cette série tournera aussi autour de deux candidats, qui font très fortement penser à Patrick et à Bart.

Bien sûr, la grande attention accordée à ces deux hommes s’explique partiellement par la réalité politique : en effet, à la question de savoir qui, en janvier 2013, sera bourgmestre, il ne fait pas de doute que Janssens et De Wever sont les mieux placés. Or, dans notre pays, l’enjeu des élections communales se situe au-delà de cette simple interrogation. En effet, nous ne connaissons ni l’élection directe du bourgmestre (sauf en Région wallonne, où elle a été partiellement introduite) ni le vote majoritaire, qui met souvent en présence deux partis dominants.

Mais on a pourtant l’impression de se trouver impliqué dans un tel système. Les projecteurs des médias braqués sur Janssens et De Wever reflètent en partie la réalité politique, mais les médias participent simultanément à la mise en oeuvre et au renforcement de cette réalité. Et Patrick et Bart y contribuent également, car un duel est dans leur intérêt. C’est dommage pour les autres prétendants qui auront beaucoup de mal à se faufiler entre ces deux-là. Mais c’est regrettable aussi pour le débat de fond sur la gestion future d’Anvers. Car, abstraction faite des perceptions et des slogans, il n’est pour l’instant pas toujours aisé de savoir exactement quelles sont les différences fondamentales entre ces deux adversaires politiques quant à l’avenir de la métropole portuaire.

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