Gérald Papy

Boycotter l’Euro 2012 ? Une réaction trop tardive

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Faut-il boycotter le championnat d’Europe de football qui se tiendra du 8 juin au 1er juillet en Pologne et en Ukraine ?

Les présidents d’Allemagne, de République tchèque, de Slovénie, d’Autriche et d’Italie ont annoncé qu’ils n’assisteraient pas à un sommet des pays d’Europe centrale prévu à la mi-mai dans la ville ukrainienne de Yalta. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et sa commissaire à la Justice et aux Droits fondamentaux, Viviane Reding, ont décliné toute invitation en Ukraine de la part de l’Union européenne des associations de football (UEFA) dirigée par le Français Michel Platini. D’autres boycotts sont attendus…

Co-organisatrice de l’événement, l’Ukraine n’est pas un modèle de démocratie en Europe. On le savait en avril 2007 au moment de sa désignation comme pays hôte de l’Euro 2012, aux côtés de la Pologne, membre, elle, de l’Union européenne. Aujourd’hui, c’est le sort réservé à l’ancien premier ministre Ioulia Timochenko, condamnée à 7 ans de prison pour abus de pouvoir et incarcérée depuis août 2011, qui provoque des réactions aussi virulentes que tardives de dirigeants européens. Accusant ses geôliers de l’avoir maltraitée, l’ancienne égérie de la Révolution orange de 2004 a entrepris une grève de la faim qui dure maintenant depuis une douzaine de jours. Elle entend par là dénoncer l’acharnement présumé du pouvoir, celui du président pro-russe Victor Ianoukovitch, qui a succédé en 2010 au pro-européen Viktor Iouchtchenko. Mais c’est pour avoir conclu un accord secret en matière énergétique avec la… Russie que Ioulia Timochenko a été emprisonnée.

Bref, voilà l’UEFA devenue otage d’une situation politique délétère en Ukraine aux responsabilités partagées où les uns et les autres ont des intérêts politiques à la réussite ou à … l’échec de l’Euro 2012. Un climat d’autant plus précaire qu’il pourrait connaître des développements au plan de la sécurité. On en a beaucoup moins parlé que de la grève de la faim de Ioulia Timochenko, Pourtant, sa ville natale, Dnipropetrovsk, qui certes n’accueillera pas de matches de l’Euro 2012, a été le théâtre vendredi dernier de quatre explosions criminelles qui ont fait 27 blessés. La sécurité des touristes du football sera-t-elle assurée en Ukraine ?

Cela étant, qu’un Etat européen décide aujourd’hui le retrait de son équipe de foot de la compétition paraîtrait vain et déplacé. Qu’un même Etat n’y délègue pas ses plus hauts représentants, y compris lors de la finale à Kiev le 1er juillet, aurait sans doute un impact politique, même s’il serai surtout symbolique. En fait, la moins mauvaise réponse à l’incongruité de la tenue de l’Euro 2012 en Ukraine est de toute façon trop tardive. C’est au moment du choix des deux pays hôtes, en avril 2007, et depuis cette désignation qu’il fallait agir pour aider l’Ukraine à se réformer. L’Europe ne l’a pas fait, ou pas assez.

Gérald Papy

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