© Image Globe/Eric Lalmand

Bogaert (CD&V) : « La trêve communautaire est mauvaise pour la Flandre et la Wallonie »

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Bart De Wever et la N-VA sont en froid avec le Mouvement flamand. Hendrik Bogaert, député CD&V de la majorité gouvernementale, s’engouffre dans la brèche : la trêve communautaire lui pèse, vivement 2019 pour repartir au combat avec le CD&V.  » J’espère qu’on optera pour un gros paquet de nouvelles compétences à transférer »…

Le mouvement flamand a le moral dans les chaussettes depuis que Bart De Wever a frisé la trahison en suggérant qu’un bras de fer communautaire ne sera peut-être pas incontournable en 2019, si d’aventure un Michel II pouvait rempiler avec les socialistes maintenus sur la touche.

Meurtri, le Vlaamse Volksbeweging (VVB) trouve quelque réconfort et consolation auprès d’Hendrik Bogaert. Oh bien sûr, ce n’est pas une déclaration de foi séparatiste que Grondvest, le périodique du VVB, a su arracher lors de l’entretien que lui a accordé le député fédéral CD&V, par le plus grand des hasards en plein rififi à la N-VA. Mais un vibrant plaidoyer en faveur d’une poursuite du désossement de la Belgique, de la part d’un représentant du camp gouvernemental, c’est nettement mieux que rien par les temps qui courent.

Hendrik Bogaert, 48 ans, secrétaire d’Etat à la Fonction publique dans le gouvernement Di Rupo, a la fibre flamande chevillée au corps. Parlementaire remuant et non dénué d’influence au CD&V, il fut jadis l’auteur d’un projet décoiffant d’ « Union personnelle » entre la Flandre et la Wallonie, moyennant le versement de 34 milliards d’euros par la première à la seconde, après quoi le sud n’aurait qu’à se débrouiller au bout de quatre ans. Un homme comme les aime le Mouvement flamand,  » un de ceux qui, au sein du CD&V, maintient la flamme flamande », se réjouit Grondvest. Et de fait, Bogaert ne déçoit pas les attentes du lectorat flamingant le plus pointu.

« La seule solution pour la Flandre et la Wallonie, c’est l’indépendance socio-économique »

On avait pourtant bien dit pas de communautaire dans les rangs de la majorité sous cette législature. Sauf que la trêve décrétée sous Michel Ier pèse visiblement à Hendrik Bogaert. « Elle est mauvaise pour la Flandre et n’est pas bonne pour la Wallonie. » Ce gouvernement fédéral fait certes du bon boulot, concède l’élu, « mais il ne pourra jamais libérer tout le potentiel de la Flandre comme de la Wallonie. Les vieux maux persistent trop. » Il veut parler sans détours de ces transferts financiers nord-sud qui n’en finissent pas de ne pas diminuer, pour le malheur de tout le monde : « La Flandre sponsorise une politique wallonne qui ne profite pas à la population. Cela coûte à la Flandre mais aussi à la Wallonie. »

Qu’on en finisse, le plus tôt sera le mieux. Encore faudrait-il que le moteur de l’autonomie flamande soit en mesure de s’emballer à nouveau en 2019. L’interviewé croise les doigts : « La crainte est grande, à juste titre, que de nouvelles étapes ne soient pas franchies. La balle est dans le camp des partis flamands. » CD&V compris ? Le parti ne se dérobera pas le moment venu et fera honneur à son passé, croit pouvoir prétendre son représentant. « J’espère que nous opterons pour un grand paquet de nouvelles compétences à transférer. Lorsque nous présentons un paquet, il y a une chance sérieuse pour que celui-ci devienne réalité. »

« Plus d’autonomie serait bon pour les chômeurs wallons »

Après tout, il suffit de dépoussiérer le cahier de doléances : les sacro-saintes résolutions adoptées par le Parlement flamand en 1999, cette oeuvre inachevée du combat pour une Flandre ultra-autonome. « Les résolutions sont un programme minimum et la moitié d’entre elles environ ont été mises en oeuvre. Il faut certainement encore réaliser le reste. Du pain sur la planche, donc », constate

Bogaert, lequel n’entre pas dans les détails. « Le reste » ? Voyons voir : la régionalisation de l’impôt des sociétés, la régionalisation du rail, la scission des allocations de chômage, voire de la dette publique. Tout ce qui, en tout cas, pourra mener à « la seule solution pour la Flandre et la Wallonie, l’indépendance socio-économique ». Et l’indépendance tout court, tant qu’on y est ? L’élu CD&V ne va pas jusque-là, la question qui tue ne lui a d’ailleurs pas été posée. Mais pour sûr, « plus d’autonomie serait bon aussi pour les chômeurs wallons. »

Hendrik Bogaert a les crocs. Sa fringale d’autonomie XXL pour la Flandre, qu’il réaffirme haut et fort au nez et à la barbe de la N-VA, tombe à pic pour inciter le public-cible flamingant à ne pas désespérer. Elle a pour vertu de replacer le CD&V dans la course sur un segment électoral où le grand parti nationaliste flamand ne compte plus uniquement que des amis. Et Bogaert ose tout, même brûler la politesse au « Messie de Flandre »: « Commençons par nous réunir entre représentants politiques de tous les partis qui estiment qu’il faut poser de nouvelles étapes. Je suis demandeur. » Et Bart De Wever, libre un de ces soirs ?

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