© Reuters

Bientôt un secret professionnel partagé pour repérer la radicalisation ?

Le recours à la technique du « secret professionnel partagé » figure parmi les pistes suggérées aux sénateurs par les services juridiques de la Haute assemblée pour faciliter l’échange d’informations à des fins de détection du radicalisme.

Les fonctionnaires soulignent que l’échange d’informations constitue un élément essentiel de la détection du radicalisme. Certaines professions sont soumises soit au secret professionnel (médecins, avocats…) soit au secret de la fonction (enseignants), une nécessité visant à créer une relation de confiance qui peut cependant constituer une entrave à l’échange d’informations entre services. Une controverse est née récemment quand il est apparu que des informations recueillies par une enseignante sur la radicalisation d’un des kamikazes des attentats de Paris n’avaient pas été échangées. La note des services du Sénat suggère de désigner des « personnes de contact » ou de recourir à la technique du « secret professionnel partagé ». Une modification de la législation relative au secret professionnel est également envisageable, même si les juristes du Sénat la juge difficilement conciliable avec les droits et libertés fondamentaux.

Réunis en commission spéciale « Radicalisation », les sénateurs ont jugé le dossier complexe, la notion de secret professionnel pouvant revêtir un caractère relativement large, selon les professions. Il ne faudrait pas non plus que la nécessité de créer une relation de confiance soit vue comme une charge. Les sénateurs, qui n’ont pas vocation à légiférer en la matière, continueront à en débattre dans les prochaines semaines, notamment sur base d’expériences déjà testées à l’initiative du parlement flamand.

La note, d’une quinzaine de pages, rédigée par les fonctionnaires du Sénat énumère les difficultés qui se présentent dans la détection du radicalisme, une matière qui comme bien d’autres en Belgique fait l’objet de compétences éclatées. Elle souligne notamment l’absence de coordinateur national rassemblant l’expertise et les bonnes pratiques des différentes entités du pays. Le comité de concertation pourrait remplir un tel rôle. Il n’y a pas non plus de point de contact national habilité à renvoyer les signalements et questions des citoyens vers les instances ad hoc. Les services observent également que la politique de prévention du radicalisme en prison diffère d’une entité à l’autre et peut dès lors s’avérer divergente au sein d’une même prison. La reconnaissance des mosquées et des imams est également éclatée entre niveaux de pouvoirs avec comme conséquence un certain flou, notamment sur la question de savoir qui est compétent en cas de radicalisation. Les fonctionnaires sont également d’avis que la classification du plan Radicalisation coordonné par l’OCAM conduit à mener une politique qui, contrairement aux pratiques britanniques et néerlandaises, « n’a pas la transparence nécessaire ».

Par ailleurs, la note s’interroge sur l’opportunité d’adopter des mesures administratives restrictives de liberté, à l’instar d’un projet néerlandais contesté, auquel cas, il pourrait être judicieux d’y adjoindre un « programme de déradicalisation ».

Les services évoquent encore l’appel du parlement flamand à prévoir une chambre flamande et une chambre francophone au sein de l’Exécutif des musulmans, observent que les Communautés et Régions ne sont pas représentées au sein du Conseil national de sécurité, invitent à prendre en compte les initiatives européennes en matière de lutte contre le radicalisme sur les réseaux sociaux et internet et suggèrent un accord de coopération, en matière de commerce des armes, à propos des services de douane et de la Justice. Enfin, le texte rappelle qu’il n’existe en Belgique aucune base constitutionnelle pour l' »état d’urgence ».

Contenu partenaire