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Bébé mort à Lodelinsart : « cette jeune fille ne pouvait pas parler de sa grossesse »

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Ce dimanche, une habitante de Lodelinsart a découvert le cadavre d’un nourrisson dans sa poubelle. L’enfant est vraisemblablement celui de sa petite-fille de 14 ans qui aurait caché sa grossesse et accouché en secret. Un fait-divers rare, mais qui pose question, alors que de nombreux moyens sont mis en place pour éviter ce genre de drame en Belgique. Nous avons fait le point avec Isabelle Somze, psychologue au Planning familial des Marolles, à Bruxelles.

Comment pouvez-vous expliquer qu’une jeune fille de 14 ans puisse accoucher seule ? Lorsque ce genre de fait-divers survient, nous (les professionnels) ne pouvons nous empêcher de nous demander comment cela a pu arriver. Son entourage s’est-il rendu compte de sa grossesse ? A-t-elle cru qu’elle ne pouvait pas en parler ? A-t-elle eu peur ou honte ? Aujourd’hui, la pilule est gratuite pour les moins de 21 ans, l’avortement est possible et beaucoup de choses sont mises en place pour éviter que ce genre de cas dramatique ne se produise. Mais quelque part, c’est également très facile pour une jeune fille de passer à côté de l’information et de se retrouver démunie face à une grossesse.

Selon vous, ce fait-divers prouve que quelque chose n’a pas fonctionné ? Oui. Ce n’est pas un reproche pour les adultes qui l’entourent, mais je me pose la question de manière sociologique. « Qu’est-ce qui a fait qu’elle pensait qu’elle ne pouvait pas parler ? » Il y a des éléments dans cette affaire qui me font penser qu’elle ne pouvait pas parler.

Parmi les grossesses précoces en Belgique, quelle proportion de jeunes filles a moins de 16 ans ? Une grossesse chez une jeune fille qui est sexuellement mineure est toujours moins anodine et monopolise beaucoup plus les esprits des professionnels. Mais cela ne reste pas moins exceptionnel, même si ce n’est pas rare.

Quel système de prévention est mis en place pour les jeunes en Wallonie et à Bruxelles ?

Nous travaillons essentiellement à la sensibilisation à la vie affective et sexuelle. Nous organisons des animations gratuites sur demande dans les écoles principalement.

Depuis quelque mois, un nouveau décret du parlement de la fédération Wallonie-Bruxelles impose au programme des écoles, un chapitre consacré à « l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle ». C’est une très bonne nouvelle, mais les écoles peuvent encore décider comment elles veulent aborder cette question avec leurs élèves. Et certains établissements sont encore très réticents concernant une éventuelle séance d’information organisée par un planning familial. Nous devons donc souvent d’abord convaincre les directions, les enseignants et les centres PMS, avant de pouvoir rencontrer les jeunes.

Quel suivi est organisé lorsqu’une jeune enceinte se présente dans un centre de Planning familial ?

Elle est accueillie par un professionnel qui va prendre le temps de l’écouter avant tout et va ensuite l’informer sur les différentes possibilités qui s’offrent à elle. Souvent, les jeunes filles ont peur que les adultes qui l’entourent l’obligent à avorter. Nous leur rappelons donc que même en étant mineures, elles disposent de leur corps et ont droit au secret médical comme tout autre patient.

La Belgique est plutôt bien positionnée par rapport à d’autres pays et le nombre de grossesses précoces a diminué de 10 % ces cinq dernières années. Comment expliquez-vous ces bons résultats ?

Je rêve d’un monde où l’on pourrait parler beaucoup plus et beaucoup plus facilement de sexualité et avec plus de liberté dans les écoles. Mais on ne peut pas nier qu’il existe une bonne politique plutôt efficace dans notre pays, même si nous voulons toujours pouvoir en faire plus.

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