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Au bord de la rupture, cours et tribunaux lancent un cri d’alarme

Le Collège des cours et tribunaux dénonce non seulement la diminution des moyens dévolus aux missions traditionnelles des cours et tribunaux mais également l’absence de nouveaux moyens pour la mise en oeuvre de la réforme de la gestion autonome. « Nos cours et tribunaux assument aujourd’hui des tâches de plus en plus nombreuses avec des moyens de plus en plus réduits. Nous lançons un appel au gouvernement pour qu’il tienne compte de cette situation, intenable à terme », a déclaré le président du Collège, Jean-Louis Desmecht.

Les 2 milliards d’euros alloués l’an passé à la justice seront réduits à 1,6 milliard cette année, soit une diminution de 12% du budget de personnel, de 28% des frais de fonctionnement et de 33% des investissements. Beaucoup de juridictions risquent d’évoluer vers, voire se trouvent déjà à, une occupation de leur cadre légal inférieure à 80% alors qu’actuellement, le montant des factures impayées s’élève à 101 millions d’euros.

En tenant compte en plus du départ à la retraite de nombreux magistrats dans les 5 années à venir, la justice se trouve à un « carrefour infernal », selon le Collège. « Nous sommes au bord de la rupture. Aujourd’hui, nos citoyens méritent mieux que ce que l’on nous permet de déployer en moyens humains et matériels », a souligné M. Desmecht. Le gouvernement devrait au moins maintenir l’enveloppe de 2 milliards d’euros et remplir le cadre à 100%, estime le Collège alors que le ministre de la Justice, Koen Geens, souhaite étaler l’effort budgétaire de 4% demandé à la justice, en ne réalisant qu’1% cette année.

Par l’entreprise de deux Collèges, l’un pour les cours et tribunaux et l’autre pour les parquets, de comités de direction locaux et de contrats de gestion, les magistrats assureront désormais de manière autonome la gestion des moyens financiers et en personnel de la justice.

Les juges ne contestent pas cette réforme élaborée sous la législature précédente mais ils réclament les moyens nécessaires pour la mettre en oeuvre. Or, actuellement, les services d’appui annoncés seront insuffisants et les juges qui siègent dans ces organes ne pourront bénéficier de détachements pour accomplir ces nouvelles tâches managériales. « C’est une collision frontale entre notre travail traditionnel et le travail qui nous est demandé en plus. Nous sommes demandeurs de la gestion autonome mais pas tant que nous ne recevrons pas des moyens en plus », a dit le président du Collège.

Les juges n’évoquent pas une grève. « Cela ne ferait que reporter les problèmes », selon M. Desmecht. Mais ils avertissent le pouvoir politique des conséquences des problèmes qu’ils traversent: augmentation de l’arriéré judiciaire, épuisement du personnel judiciaire, fermeture de certaines chambres, ralentissement d’une informatisation déjà à la traîne, etc. « Les moyens d’actions sont involontairement déjà là », a complété Serge Wynsdau, membre du Collège. Le ministre de la Justice a suggéré récemment que, sur base volontaire, les juges puissent travailler jusqu’à 70 ans. Les membres du Collège des cours et tribunaux n’y sont pas opposés mais ils parlent de « réformette ». « Nous avons tous rencontré des collègues qui partaient à la retraite la mort dans l’âme. Je crains qu’aujourd’hui, on en rencontre de moins en moins », a fait remarquer le président.

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