Walter Pauli

« Après le saut d’index, la N-VA remporte à nouveau un trophée de taille »

Walter Pauli Walter Pauli est journaliste au Knack.

Le premier ministre Michel a dû déployer des trésors d’ingéniosité pour mettre les quatre partenaires de coalition sur la même longueur d’onde. Pour Walter Pauli, notre confrère de Knack, ils suivent la ligne politique de la N-VA.

Jeudi passé, six heures et demie du matin. Le gouvernement Michel vient de trouver un accord sur le tax shift et immédiatement le vice-premier ministre Jan Jambon (N-VA) envoie un double tweet : « Klus geklaard. De regering houdt woord / Mission accomplie. Le gouvernement tient sa parole ». Ensuite, le premier ministre Charles Michel (MR) a également défendu le compromis trouvé comme un élément essentiel du projet de son gouvernement.

Pourtant, c’est surtout Jambon qui a toutes les raisons d’être content. L’argumentation développée par le premier ministre figurait presque littéralement dans le programme électoral de la N-VA : « Il est grand temps de récompenser à nouveau ceux qui travaillent, entreprennent et épargnent. En augmentant le salaire net, en baissant les charges d’entreprise, en baissant les impôts et en réduisant les dépenses d’état ». C’est ce que ce tax shift prétend faire. Le compromis du gouvernement est de toute évidence estampillé N-VA.

L’opposition note à juste titre que le tax shift est surtout financé par les augmentations de prix qu’on ne retrouve dans un aucun programme des partis de la majorité. « Ceux qui travaillent » sont touchés plus durement que ceux « qui entreprennent et épargnent ». Cela n’empêche pas la N-VA de remporter un franc succès avec cette opération. C’est surtout la baisse de charges patronales de 33 à 25% qui est un trophée de taille, à côté du saut d’index. Toutes les grandes organisations d’employeurs – la FEB, Voka et Unizo – sont satisfaites, si pas enthousiastes : la compétitivité des entreprises est boostée.

La ligne de la N-VA

L’accord sur le tax shift n’a pourtant été obtenu qu’après de pénibles négociations. Chacun à leur tour, les vice-premiers ministres ont avancé de nouvelles exigences et bloqué d’autres propositions, et finalement le premier ministre a dû déployer des trésors d’ingéniosité et de talent pour mettre les quatre partenaires de la coalition sur la même longueur d’onde avant la trêve estivale. Pas n’importe quelle longueur d’onde, celle de la N-VA.

Que la N-VA domine ce gouvernement est évidemment la conséquence du résultat électoral: le parti de Bart De Wever occupe plus de sièges de la chambre que le CD&V et l’Open VLD réunis. Mais souvent, cet excédent ne suffit pas. Les plus petits partis osent parfois conspirer contre le grand glouton. En 2007, Yves Leterme a subi cette infortune.

Le gouvernement Michel est soumis à une dynamique totalement différente. À aucun moment, l’Open VLD et le CD&V n’ont donné l’impression de faire front contre la N-VA. Bien au contraire. L’Open VLD et le CD&V se caractérisent par leur méfiance mutuelle.

Au sein du gouvernement, l’Open VLD fait office de partenaire junior de la N-VA. Non seulement le discours libéral de la N-VA est doux à l’oreille des « véritables libéraux » de l’Open VLD, mais le vice-premier ministre Alexander de Croo et les N-VA Jambon et Johan Van Overtveldt s’entendent également sur le plan personnel: tous les trois, ils parlent la langue d'(anciens) leaders d’entreprises. Le MR aussi soutient cette alliance. Le CD&V est incapable de résister à ce bloc libéral.

C’est en partie la conséquence de la formation du gouvernement asymétrique. À mesure que le gouvernement Michel prend sa vitesse de croisière, il apparaît que l’absence des chrétiens-démocrates du cdH est un handicap pour le CD&V. Au sein de la majorité, le CD&V ne trouve d’alliés naturels dans pratiquement aucun dossier. Par conséquent, le vice-premier ministre Kris Peeters peut rarement faire passer ses exigences. Et il est ridiculisé par le CSC et Beweging.net. On n’est jamais trahi que par ses amis.

Les chrétiens-démocrates flamands se sont mis dans une position impossible. Le CD&V essaie d’inciter le gouvernement Michel à une politique de centre à large assise sociale. Cependant, la N-VA n’a pas besoin de scénarios « tous ensemble » et l’Open VLD et le MR en ont assez des alliances violettes. Pourquoi voudraient-ils plaire à l’opposition, aux syndicats ou à la société civile ?

Plus le CDu0026V essaie de peser sur le gouvernement Michel, plus il s’avère que les chrétiens-démocrates en sont incapables. En fin de compte, le tax shift dévoile un glissement du pouvoir politique

Plus le CD&V essaie de peser sur le gouvernement Michel, plus il s’avère que les chrétiens-démocrates en sont incapables. En fin de compte, le tax shift dévoile un glissement du pouvoir politique.

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