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Après Bart l’informateur, Elio le formateur ?

Sauf accident de parcours, la voie vers le 16, rue de la Loi paraît tracée pour Elio Di Rupo. L’instinct de survie du futur Premier ministre francophone commandera d’embarquer le puissant patron de la N-VA au sein de son équipe.

Deux hommes au pied du mur pour réconcilier le jour et la nuit. Ils disent à peine se connaître, tout semble les séparer. Ils n’ont que de la méfiance à s’offrir en partage et n’ont même pas eu le loisir de s’apprivoiser. Ces deux-là sont encore très loin de faire la paire.

Mais les électeurs flamands et francophones ont pris un malin plaisir à ne pas leur laisser le choix. Bart De Wever, le nationaliste flamand, et Elio Di Rupo, le socialiste francophone, sont fermement condamnés à s’entendre. Priés de trouver une potion magique capable de sortir au plus vite la Belgique de l’ornière communautaire, budgétaire, socio-économique.

C’est Bart De Wever qui a ouvert le bal. Affublé pour la cause d’un costume d’informateur qui a de quoi le gêner aux entournures. Un républicain et séparatiste flamand, en service commandé par le Palais royal : l’habit ne fait pas le moine, mais à ce point-là… L’homme fort de la Flandre n’a d’ailleurs aucune intention de l’endosser trop longtemps. Il se donne deux à trois semaines pour débroussailler et baliser le terrain, puis passer la main. En toute logique, ce serait alors à Elio Di Rupo d’entrer en scène. De se draper dans un rôle de formateur. Avec pour scénario de parachever l’affiche du prochain gouvernement. De concert avec Bart De Wever, pour orchestrer la manoeuvre.

La suite de l’intrigue risque de se corser. Di Rupo, Premier ministre ? Le sacre se profile. Son nouvel acolyte le pousse à céder à la tentation. Sans le moindre esprit de sacrifice : De Wever n’ose s’imaginer une seconde habiter la fonction qui incarne le pays. Lui, un 21-Juillet, place des Palais, entonnant la Brabançonne à deux pas de la tribune royale. Un suicide politique….

Le président de la N-VA sait se faire mielleux quand il invite son homologue du PS à craquer pour un poste que les francophones convoitent depuis plus de vingt ans : « Un dangereux séparatiste qui offre le 16, rue de la Loi n’inspire-t-il pas confiance ? » Pas franchement, si c’est pour mieux enfermer son locataire dans ce que De Wever considère lui-même comme une « cage dorée. » Il veillerait à en garder le double des clés.

Gages de loyauté

Il faudra donc que le chef de file de la N-VA donne de solides gages de loyauté, le moment venu. Le plus manifeste sera d’embarquer lui-même dans le gouvernement. « Il serait impensable qu’il en soit autrement », estime Marc Hooghe, politologue à la KULeuven. « Son absence apparaîtrait comme une motion permanente de défiance qui menacerait gravement la stabilité du pays. »

De Wever au balcon, c’est la garantie de laisser dans sa ligne de tir ses ministres envoyés au casse-pipe fédéral. Quel autre poids lourd que son omniprésent président la N-VA pourrait-elle envoyer comme chef de file au gouvernement ? Geert Bourgeois, le peu visible fondateur du parti, a tout lieu de préférer son statut de ministre régional flamand. « Il faudra au moins que De Wever devienne vice-Premier ministre et lie ainsi son sort personnel à celui de la coalition », reprend Marc Hooghe. De Wever et Di Rupo dans le même bateau, pour éviter la galère.

PIERRE HAVAUX

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