Olivier Mouton

Anvers, le Waterloo de Bart De Wever ?

Olivier Mouton Journaliste

Anvers devait être la fierté de Bart De Wever, un tremplin pour le leader de la N-VA vers la conquête de la Flandre en 2014 voire la concrétisation de son rêve autonomiste. La métropole pourrait au contraire devenir son Waterloo, le champ de bataille où ses ambitions risquent de subir un coup d’arrêt historique.

Six mois après son arrivée au pouvoir triomphale dans la première ville de Flandre, Bart De Wever multiplie les déconvenues tout en exacerbant une polarisation politique qui pourrait ne pas lui être favorable. Attendu au tournant pour son premier mandat exécutif, le leader de la N-VA devait frapper vite et fort à Anvers pour montrer sa capacité à incarner le changement. Jusqu’ici, le bilan est plutôt négatif.

Il voulait introduire une taxe sur l’inscription des étrangers en donnant des gages aux électeurs du Vlaams Belang qui ont rejoint en nombre la N-VA en Flandre ? La décision a été cassée par le gouverneur d’Anvers Cathy Berx parce qu’elle était contraire au principe d’égalité. Il veut attirer un club de football de haut niveau dans sa ville ? Les négociations avec le CEO de Zulte Waregem et du KV Ostende échouent dans un grand fracas médiatique, les Anversois regrettant qu’il choisisse de faire son marché en dehors de la ville plutôt que de soutenir l’Antwerp. Les feuilletons de la neutralité de la fonction publique (et les déclarations maladroites de De Wever sur le « tee-shirt homo) ou du déplacement de la Sinksenfoor ont également écorné son image.

Sans le vouloir, l’hyperactivité symbolique de Bart De Wever donne du grain à moudre à l’opposition SP.A et Groen, très agressive, qui a beau jeu de dénoncer son incapacité à obtenir des résultats. Elle souligne aussi combien ces événements dévoilent le vrai visage d’une N-VA proche des élites, adepte de l’ancienne culture politique et des négociations en coulisses, autocrate dans son fonctionnement. Lundi soir, le groupe SP.A de Yasmine Kherbache, qui est aussi l’une des chefs de cabinet du Premier ministre Elio Di Rupo, a claqué la porte du conseil communal après que le bourgmestre lui a refusé son droit de réplique.

Anvers, Waterloo de Bart De Wever ? Il est certes trop tôt pour l’affirmer de façon péremptoire. Mais à ce jour, après sa marche triomphale sur l’hôtel de ville d’octobre dernier, il n’y a encore aucun dossier sur lequel le patron incontesté de la N-VA puisse crier victoire. Sa ville, au centre de toutes les attentions médiatiques , est divisée et les observateurs affirment d’ores et déjà que la rupture incarnée par Patrick Janssens, bourgmestre SP.A sortant, fut plus radicale en 2003. Voilà qui ne fera certainement pas rire De Wever…

« La N-VA reste fondamentalement une formation nationaliste, analyse le politologue anversois Dave Sinardet. Elle n’a pas vraiment de vision pour la ville. Son seul enjeu était surtout de profiler De Wever à Anvers et de remporter une grande victoire électorale avant 2014. » Cela pourrait se retourner contre elle.
Présente dans 160 majorités communales en Flandre dont 54 avec le maïorat, la N-VA se retrouve en effet partout confrontée à la difficulté d’incarner le concrètement le changement concret qu’elle avait promis. Souvent, on se moque de ses initiatives visant à remplacer les noms de rue trop francophones ou on est choqué par sa volonté de durcir le ton à l’encontre des immigrés. Les premiers résultats de cela se sont fait ressentir dans les derniers sondages de La Libre/ RTBF et du Standaard, tous deux pointant la N-VA en chute de 6%.

« Cela nous remet les deux pieds sur terre », a commenté De Wever. Une figure de style. Car c’est aussi et surtout le début d’une décrue dangereuse pour le parti à un an d’un scrutin majeur et alors que tout le monde, du côté francophone mais aussi désormais en Flandre, l’a pris pour cible. Contraint à exercer des responsabilités, l’ultra-populaire De Wever a sans doute sous-estimé la difficulté du pouvoir au-delà des slogans faciles et des postures de Calimero.

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