Ministre des Finances Johan Van Overtveldt © Belga

« Alors que le FMI plaide en faveur d’une déduction répandue des intérêts notionnels, la Belgique veut les supprimer »

La baisse de l’impôt sur les sociétés et une nouvelle taxe sur la plus-value sont toujours en discussion. Les choses semblent mal parties pour les deux dossiers. Le gouvernement Michel risque de faire piètre figure.

Ils ne peuvent pas s’en empêcher. Les partis du gouvernement se volent dans les plumes sur l’association d’un impôt sur les sociétés à une nouvelle taxe sur la plus-value. Entre-temps, le Fonds Monétaire International (FMI) a publié un rapport très important pour notre pays. Suite aux chamailleries, on ne lui a pas accordé la moindre attention.

Le rapport, paru fin de la semaine dernière, est consacré à la politique fiscale et aux dettes. Il prévient que la hausse des dettes des états, particuliers et entreprises constitue une menace grave pour l’économie. Il faut donc agir. Pour contrer les dettes en hausse des entreprises, le FMI plaide en faveur de la déduction d’intérêts notionnels, une mesure assez unique dans le monde qui existe en Belgique.

Le raisonnement suivi par le FMI pour promouvoir la déduction d’intérêts notionnels est classique. Dans la plupart des pays, les entreprises peuvent déduire les taux d’intérêts payés sur leurs dettes de leur bénéfice imposable. Si une entreprise n’emprunte pas, mais réinvestit l’argent de ses bénéfices, elle ne bénéficie pas de cet avantage. Mieux vaut mettre fin à ce traitement fiscal inégal- à l’instar de l’hebdomadaire The Economist, le FMI parle de « Great distortion » – en attribuant une indemnité similaire aux taux d’intérêts déductibles quand une entreprise utilise son propre capital. Donc la déduction d’intérêts notionnels.

Le plaidoyer du FMI en faveur d’une déduction d’intérêts notionnels largement répandue intervient à un moment où la Belgique souhaite les supprimer. Le ministre des Finances, Johan Van Overtveldt (N-VA), a l’intention de baisser le tarif officiel pour l’impôt sur les sociétés, de 34% à environ 20%. Sinon, cette baisse n’est pas payable, et le but n’est pas que l’état y laisse des plumes.

Le gouvernement peut toujours supprimer la déduction d’intérêts notionnels pour financer une baisse de l’impôt sur les sociétés. Après le plaidoyer du FMI, ce sera difficile. Ce plaidoyer est d’ailleurs proche d’une proposition lancée récemment par la Commission européenne pour instaurer une indemnité fiscale pour sa propre fortune. En outre, la Suisse instaure une déduction ‘intérêts notionnels à partir du 1er janvier, et le Danemark l’envisage. Au sein du gouvernement belge, le père spirituel de la déduction d’intérêts notionnels, Didier Reynders (MR), n’était pas en faveur d’une suppression. Cependant, si les intérêts notionnels continuent à exister en Belgique, il faudra se demander comment on financera la baisse de ‘l’impôt sur les sociétés. Le gouvernement Michel n’a pas encore de réponse.

Non seulement la baisse de l’impôt sur les sociétés est loin d’être terminée, mais c’est également le cas d’une nouvelle taxe sur la plus-value. Aujourd’hui, elle fait toujours partie d’un jeu politique : le CD&V n’accorde une baisse sur l’impôt sur les sociétés que si celle-ci lui permet d’avoir une taxe sur la plus-value. Le gouvernement Michel, et le CD&V en particulier, se trompe lourdement : elle considère cette taxe sur la plus-value séparément, et pas comme partie d’une plus grande réforme de notre impôt des personnes, qui doit être plus simple et plus juste.

Pratiquement tous les experts s’accordent à dire que nous devons évoluer vers un système fiscal double. Les revenus du travail sont imposés à un tarif progressif, de sorte que celui qui gagne plus doit payer plus d’impôts. Il faut moins de charges déductibles et peut-être moins de tranches d’imposition qu’aujourd’hui. Il y a aussi les revenus du patrimoine qu’on peut aussi imposer progressivement, même si la plupart des spécialistes pensent à un tarif fixe d’environ 27%, comme en Scandinavie. Manifestement, personne au sein du gouvernement Michel ne souhaite entamer une réforme aussi réfléchie de l’impôt des personnes. Ils préfèrent faire n’importe quoi et se lancer des invectives.

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