Les refuges sont submergés par les abandons d'animaux pendant les vacances © Eleonor Lukacsovics

Abandons d’animaux pendant l’été: comment les refuges s’organisent-ils ?

Stagiaire Le Vif

Le nombre de chats et de chiens abandonnés explose avant les départs en vacances. Les moins chanceux seront déposés, si pas jetés, au détour d’une route, les plus chanceux atterriront dans des refuges. Comment les associations s’organisent-elles pour gérer cette période chargée ? Rencontre avec la responsable de l’ASBL WHAF à Bruxelles.

Dans le refuge de la WHAF (World Animal Handicap Foundation), à Schaerbeek, la responsable Michelle Mommer, le sourire franc, sa chienne China à ses côtés, nous accueille dans l’espace dédié aux animaux abandonnés.

« Dès qu’un animal arrive au refuge, on regarde s’il n’est pas blessé et s’il n’a pas besoin de soins vétérinaires. Avant de le placer, s’il s’agit d’un animal trouvé, il faut également vérifier que personne ne le recherche« . La responsable du refuge ajoute : « Si nous n’avons pas de place, l’animal est envoyé vers les refuges avoisinants ou vers les fourrières. Si vraiment tout est saturé, on essaye aussi de faire appel à nos familles d’accueil. Notre refuge est particulier du fait qu’il n’accueillera pas plus d’animaux qu’il n’y a de place. »

L’association peut compter sur l’aide de 20 bénévoles et collabore avec une quinzaine de familles d’accueil. En attendant un nouveau foyer, les animaux sont répartis selon la place disponible. Une dame possédant une ferme s’est ainsi entourée de 40 chats adoptables, mais pour les autres, il s’agit de 2, 3 chats ou d’un seul chien.

Les associations partenaires n’ayant pas eu l’agrément pour être qualifiées de refuges peuvent aussi venir en aide. La coopération entre les petits refuges est primordiale pour mettre en avant le bien-être des animaux.

Abandons d'animaux pendant l'été: comment les refuges s'organisent-ils ?
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« Nous l’avons trouvé »

Les propriétaires sont parfois surpris du comportement de leur boule de poil si souhaitée au début et devenue ingérable au point de prendre la décision de s’en séparer. Il est troublant de voir à quel point ils ont été mal informés sur la race tant convoitée. Les Jack Russel, de taille petite, ne prennent par exemple, pas beaucoup de place. Pourtant, ils ont besoin d’espace pour dépenser leur énergie. Confiné dans un appartement, ce petit chien à l’apparence inoffensive peut vite devenir agressif.

Tous ces compagnons sont devenus gênants pour leur propriétaire. « Certains n’assument pas leur abandon, les excuses sont souvent ‘je l’ai trouvé’ ou ‘mon fils est allergique’. D’autres, quand on insiste, persistent même à dire qu’ils ne connaissent pas la bête, pourtant le chat semble familier avec la personne ou l’émotion trahit celui qui s’en débarrasse. Certains parents envoient même leurs enfants faire le sale boulot  » déplore Michelle Mommer qui est d’avis que les abandons les plus lâches restent les animaux déposés dans une boîte devant la porte.

Des histoires qui se répètent

L’histoire de ce malinois, c’est celle d’un chiot adopté par un plombier et sa famille. Le chien est joueur et habitué aux enfants. Tout se déroule admirablement bien. Mais voilà, il grandit et ces chiens peuvent vite devenir incontrôlables s’ils ne sont pas éduqués correctement. Tout déraille rapidement, le maître n’a plus le temps ou ne prend plus le temps de s’en occuper. Sa femme se retrouve seule à la maison.

Quand le malinois commence à détruire le mobilier, il se retrouve enfermé dans une pièce noire où ses seuls moments pour se dégourdir les pattes sont les sorties pour se soulager. La femme ne veut plus de ce chien devenu encombrant. Il est alors envoyé chez un ami, mais cet homme instable psychologiquement n’arrive pas à assumer la bête. Déjà déprimé par la solitude, le chien devient craintif, ce qui le rend agressif. L’homme s’en débarrasse en l’abandonnant devant chez lui. Les voisins alertés préviennent le refuge qui se rend sur place. Ces derniers ne peuvent que constater la dangerosité de l’animal pour les passants.

A force de patience et de ténacité, c’est l’une des bénévoles du refuge qui parvient à lui passer une muselière et à l’attacher. Toutes les places sont prises et vu la nervosité du chien, il est impossible de le garder. Il s’ensuit une course pour trouver un endroit où le placer. Après avoir fait appel en vain à la police et à la brigade canine, Michelle Mommer prend les choses en main pour lui dégoter un endroit où dormir. C’est là qu’au fil de ses recherches, elle trouve le beau-frère du propriétaire prêt à l’accueillir,… mais pour combien de temps ?

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Une vie pour une vie

Dans les autres refuges, les murs ne sont pas extensibles, lorsqu’un nouvel animal est recueilli, un autre doit lui laisser sa place. Telle est la loi. Cependant, le refuge WHAF ne pratique pas l’euthanasie. Les petits orphelins y seront soignés et stérilisés pour ensuite être remis à l’adoption.

Actuellement ce sont 12 à 15 chiens, 30-36 chats et 4-5 lapins, cochons d’Inde et oiseaux qui peuvent être accueillis à la WHAF. Le refuge a bien constaté une diminution des abandons de chien il y a 5-6 ans lorsque l’identification est devenue obligatoire. Les maîtres se sentaient alors davantage coupables et responsables puisque leur nom se trouvait dans la puce.

Les chats aussi ont l’obligation d’être stérilisés et pucés. Cependant, les contrôles restent compliqués et l’amende prévue en cas d’abandon est donc rarement appliquée.

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Un manque criant de moyen financier

L’ASBL WHAF est autorisée à installer un stand dans certaines animaleries et à accoster les clients pour qu’ils fassent un don. Mais depuis plusieurs années les refus se multiplient, la vie est chère et les personnes qui donnaient 15 euros par mois, n’arrivent plus à suivre. « Les donateurs se raréfient, ils s’usent avec le temps, les dons diminuent » regrette Michelle Mommer.

En effet, le manque de subside se ressent. La structure a besoin de 3000 euros par mois pour fonctionner et ne reçoit que 3400 euros de subsides pour un an. Pour retrouver des fonds, une employée a été engagée pour démarcher auprès d’entreprises prêtes à soutenir la bonne cause.

Cependant Michelle Mommer garde espoir, le nombre d’adoption a augmenté en mars, avril et mai. « Les gens savent qu’ils trouveront chez nous des animaux en règles avec la législation. De notre côté, nous observons le comportement de l’animal. Nous pouvons ainsi mieux guider les personnes prêtes à adopter un compagnon. Ces derniers, une fois sondés pourront repartir avec un animal correspondant à leur mode de vie« .

Michelle, une vie dédiée aux animaux

Michelle Mommer, responsable de l’asbl WHAF, n’était encore qu’une enfant quand elle commence à sauver des animaux. « Je ramenais tous les chats errants et blessés à la maison et je leur trouvais ensuite une famille. J’ai vécu près d’une ferme dans une vraie culture animalière inculquée par ma grand-mère » nous confie-t-elle.

En grandissant, sa passion pour les animaux ne s’est pas tarie. Après quelques années de patience, elle finit par adopter un Teckel dans les années 1990. Lina, de son petit nom, se fait opérer, mais en ressort paralysée de l’arrière-train. Sa maîtresse dévouée se tourne alors vers les Etats-Unis, les seuls à l’époque à fabriquer des prothèses légères. De là, tout s’enchaîne, le petit Teckel devient un exemple pour les passants. Le bouche-à-oreille se met en place, son téléphone privé devient public. Elle décide alors de créer une ASBL pour aider les chiens à trouver une prothèse adaptée à leur patte.

Après quelques années, elle se rend compte que les chiens ayant un problème mécanique sont choyés par leur maître. Elle se tourne alors vers ceux souffrant d’une autre détresse. « Notre rôle d’aider les chiens handicapés est devenu secondaire, nous nous concentrons désormais sur des animaux abandonnés qui ont perdu tout leur repère« , déclare Michelle.

E. Lukacsovics

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