Willy Borsus et Pierre-Yves Jeholet © BELGA/Bruno Fahy

5 milliards d’euros: le plan « ambitieux » de la Wallonie pour 2019-2024

Le gouvernement wallon a adopté mercredi un plan d’investissements de 5,03 milliards d’euros, répartis sur 31 projets, et s’étalant sur la période 2019-2024. Ce plan additionnel aux fonds déjà dégagés pour le soutien à l’économie wallonne ou la rénovation de certaines infrastructures ne remet pas en cause l’objectif de retour à l’équilibre budgétaire.

Il s’agit d’un « plan ambitieux » qui répond à « un constat largement partagé d’un sous-investissement structurel » depuis de nombreuses années dans les infrastructures publiques, a déclaré le ministre-président Willy Borsus (MR) au cours d’une conférence de presse, en présence de l’ensemble du gouvernement wallon.

Le plan wallon comporte 31 projets d’investissements d’infrastructure de plus de 10 millions d’euros susceptibles de générer un retour sur investissement. Ces projets concernent tant les bâtiments publics, que l’action sociale, la recherche, le logement, la transition économique, l’énergie, les aéroports, …

Par exemple, plus de 70 millions d’euros seront consacrés à la construction de nouvelles places en maisons de repos et de nouvelle crèches; 50 millions sont prévus pour combler les « zones blanches » pour les télécommunications en zone rurale; 135 millions d’euros pour la transition énergétique des entreprises; 100 millions d’euros pour les réseaux de gaz; 80 millions pour de grandes infrastructures touristiques; 600 millions d’euros pour la mobilité; ou encore 755 millions pour le logement, qu’il soit public (rénovation/création) ou privé (aide à l’efficacité énergétique).

Parmi les 31 projets du plan wallon, trois « dossiers considérables », pesant à eux seuls un total de 1,73 milliard d’euros, seront proposés par la Wallonie dans le cadre du pacte national d’investissements stratégiques piloté par le fédéral. Ces trois projets ont trait à la recherche et à l’innovation (700 millions), à la multimodalité (530 millions) et au développement de compteurs intelligents (500 millions). Si le fédéral venait à prendre en charge tout ou partie de ces trois projets, cela donnerait autant de marges de manoeuvre en plus pour la Wallonie, indique-t-on au gouvernement wallon.

Dans son exercice de soutien à l’investissement, l’exécutif wallon a décidé de mobiliser autant que possible le secteur privé ou les pouvoirs locaux. « Chaque projet sera examiné préalablement pour voir s’il est éligible à un partenariat public-privé (PPP) », a précisé M. Borsus, assurant que le plan wallon d’investissements ne remet pas en cause l’objectif d’un retour à l’équilibre budgétaire au plus tard en 2020.

« Le retour à l’équilibre budgétaire est le socle, les fondations de la maison. Sur cette base, on pourra la développer », a confirmé le ministre du Budget, Jean-Luc Crucke, évoquant pour sa part un « monitoring » qui verra le plan s’accélérer en cas de bonne tenue de l’économie ou, le cas échéant, ralentir.

Sur l’ensemble des 5,03 milliards évoqués, 2,8 milliards concernent des partenariats-public-privé (PPP) et 300 millions d’euros des « nouveaux investissements du secteur public local ». Le montant comprend également un « buffer » ou matelas de sécurité de 204 millions d’euros, sachant que les montants évoqués pour l’un ou l’autre projet pourraient encore évoluer.

Le plan wallon d’investissements vient par ailleurs en supplément d’autres plans déjà adoptés ou pérennisés comme les 425 millions d’euros annuels de soutien à la croissance et à l’économie wallonne (ce qui succède au Plan Marshall), le plan « infrastructures » pour les réseaux routier et fluvial ou les accords-cadre en matière de rénovation du patrimoine. L’emblématique projet de tram à Liège n’y est pas non plus repris.

Parallèlement au plan d’investissements présenté mercredi, le gouvernement wallon a décidé de revoir toute une série de procédures (permis, délais de tutelle…) afin d’accélérer les investissements tant publics que privés. Le gouvernement veut aussi accorder plus de latitude aux communes pour leur permettre, si elles en ont les capacités, d’investir davantage.

Enfin, le gouvernement veillera à ce que les investissements publics réalisés s’inscrivent pleinement dans la lutte contre le dumping social.

« Un plan décevant, sujet à plusieurs hypothèques », selon le PS

Le plan d’investissement présenté mercredi par le gouvernement wallon est « une belle déclaration d’intention » mais « n’est pas à la hauteur. Il est soumis à plusieurs hypothèques », a réagi le chef de groupe PS au Parlement wallon, Pierre-Yves Dermagne.

Selon l’ancien ministre wallon, ce plan de 5,03 milliards d’euros, étalé sur la période 2019-2024, est un « recyclage » de certaines mesures déjà décidées par le précédent gouvernement wallon PS-CDH. Et Pierre-Yves Dermagne de citer le plan piscines, la création de nouvelles places dans les maisons de repos, les halls-relais agricoles, les accords-cadre en matière de patrimoine ou les mesures touchant aux logements, comme autant de mesures qui allaient être concrétisées par la précédente majorité.

« Pour le reste, ce plan est sujet à plusieurs hypothèques et notamment à un accord de l’Europe sur un éventuel assouplissement budgétaire », poursuit le député wallon, qui évoque également le montant de 2,8 milliards d’euros prévus dans le cadre de partenariats public-privé. Un mécanisme d’investissement qui est régulièrement requalifié par l’Europe en dépense publique pure, qui est « difficile à mettre en place », comme l’a montré le dossier du tram de Liège, et qui « au final coûte davantage » aux pouvoirs publics, selon le chef de groupe PS.

« Enfin, tout cela dépendra du prochain gouvernement et du prochain parlement. Avant 2019, il n’y a quasiment rien de prévu », en terme d’investissements, selon l’ancien ministre. Si le PS est favorable à des investissements publics dans la mobilité, la recherche, l’énergie ou encore le logement, « ce qui a été présenté par le gouvernement wallon n’est pas à la hauteur », conclut-il.

« Surtout un plan de communication », selon Ecolo

Le plan d’investissement est « à ce stade, surtout un plan de communication », a réagi le chef de groupe Ecolo au Parlement wallon, Stéphane Hazée.

Le député vert voit dans ce plan « une démarche positive dans son principe », qui consacre « un revirement à 180 degrés pour certains au sein de la coalition et en particulier pour le MR, qui voit enfin les investissements comme un élément positif à mettre oeuvre et non plus comme une dépense comme les autres, qui devrait être payée cash l’année de sa réalisation ».

Mais, poursuit Stéphane Hazée, « ce plan d’investissement, pour être crédible, doit reposer sur des moyens réels et additionnels » et non être du « recyclage de moyens déjà dévolus aux investissements. » Or, à peine 100 millions d’euros, soit 2% du total du plan, sont réellement prévus sous cette législature, observe-t-il, estimant dès lors qu’il s’agit, à ce stade, d’un « plan de communication. »

Concernant les 31 projets annoncés mercredi par le gouvernement wallon, Ecolo estime que certains sont intéressants, notamment en matière d’énergies renouvelables, de transports en commun ou de maisons de repos, « même si c’est aussi l’inventaire de ce que le gouvernement n’a pas fait depuis quatre ans, en particulier en matière de mobilité ».

D’autres projets, par contre, trouvent beaucoup moins grâce aux yeux du chef de groupe Ecolo, comme « le déploiement généralisé des compteurs communicants » ou les « autoroutes autour des aéroports ».

Stéphane Hazée regrette enfin que les interlocuteurs sociaux, la société civile et l’opposition n’aient pas été associés dans le choix des projets retenus.

Contenu partenaire