La signature du Traité de Versailles, le 28 juin 1919. © Bettmann/getty images

4 mai 1919 : le roi Albert Ier s’inquiète du Traité de Versailles

Vendredi, samedi… et même dimanche ! En ce début mai, le gouvernement se réunit sans interruption. C’est que l’heure est grave : d’ici peu, le Traité de Versailles va être signé. Et ses dispositions mécontentent fortement les Belges. Le dimanche 4 mai, ce n’est d’ailleurs pas un banal conseil des ministres qui se tient ; c’est un conseil de la Couronne. Un événement exceptionnel : dans l’histoire du pays, c’est à peine la troisième fois que l’instance est convoquée.

Le 4 août 1914, la Belgique est envahie par les Allemands. Sa neutralité, pratiquement garantie depuis ses origines, se trouve violée. Aux yeux du monde, la Belgique devient une victime. Certes, on s’extasie devant le courage de sa résistance et l’héroïsme de son roi. Il n’empêche, des relations internationales, la poor little Belgium est moins considérée comme un vrai sujet que comme un simple objet.

Au lendemain de la libération, c’est à Paris que les vainqueurs se retrouvent pour discuter de l’après-guerre. La Belgique est représentée par un trio de haut vol : le ministre des Affaires étrangères Paul Hymans, le ministre de la Justice Emile Vandervelde et le ministre d’Etat Jules Van den Heuvel. Un libéral, un socialiste et un catholique. Dans leurs valises, deux revendications. D’une part, ils exigent des réparations financières – ils veulent que l’Allemagne paie pour l’entièreté des dégâts commis. D’autre part, ils demandent que la sécurité du pays soit mieux garantie et que ses frontières soient élargies. A Bruxelles, certains réclament carrément d’obtenir le Luxembourg, le Limbourg néerlandais, la Flandre zélandaise, une partie de la Rhénanie et des territoires africains.

La désillusion est rapide. Tout d’abord en matière de procédures. La diplomatie belge espérait activement participer aux débats ; or, ceux-ci se limitent à une tripartite entre Américains, Britanniques et Français. Surtout, lorsque les Belges font entendre leurs demandes, elles sont à peine écoutées. En avril, Albert Ier se rend à Paris pour soutenir la délégation. Sans parvenir à inverser la tendance.

Fin avril, un projet de texte est communiqué. C’est la douche froide. Financièrement, la Belgique n’obtiendrait que de faibles montants ; territorialement, elle devrait se contenter des cantons de l’Est. Indignation ! Comment réagir ? En rejetant le Traité ? Le gouvernement se tâte. Le 3 mai, le roi préside le conseil des ministres. Il insiste :  » la Belgique a subi, pour la cause commune, l’occupation ennemie pendant quatre années. C’est là un élément dont on doit tenir compte.  » Une idée est lancée : consulter les ministres d’Etat. Le lendemain, le conseil de la Couronne se réunit au palais. Le procès-verbal de la réunion est sans équivoque :  » Les ministres d’Etat, consultés par le gouvernement, sont unanimes à penser que le gouvernement doit signer le Traité, parce qu’il n’y a rien d’autre à faire « . La force de l’évidence. Le 28 juin, le Traité est signé. La Belgique figure bien parmi les pays vainqueurs de la guerre. Mais elle en est sans doute le moins victorieux.

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