Renaat van Elslande : une nomination surtout pour le symbole. © BELGAIMAGE

26 JANVIER 1973 : LE PREMIER FLAMAND AUX AFFAIRES ÉTRANGÈRES

C’est une révolution qui était attendue de longue date. Pour une fois – pour la première fois ! – un politique néerlandophone est nommé à la tête de la diplomatie belge. En ce jour de prestation de serment, un grand sourire barre le visage du CVP Renaat Van Elslande. L’homme obtient enfin le poste qu’il convoitait depuis tant d’années. Il ne le marquera toutefois guère de son empreinte.

Depuis toujours, le service extérieur belge est un bastion francophone. Et de tous temps, les ministres belges des Affaires étrangères ont parlé le français. Logique : en Belgique, c’est la langue de l’élite et en Europe, c’est la langue de la diplomatie. Mais les temps changent. Petit à petit, le centre de gravité se déplace de la Wallonie vers la Flandre. Et celle-ci entend aussi pouvoir se mêler des affaires extérieures. C’est dire si, après les Hymans, van Zeeland, Spaak et Harmel, la désignation de Van Elslande est largement saluée au nord du pays.

Ailleurs, c’est plutôt le doute qui domine.  » Sa nomination n’a été que le résultat d’un dosage où son étiquette politique et sa qualité de Flamand ont pesé d’un grand poids « , écrit l’ambassadeur de France à Bruxelles.  » Il est honnête et intelligent, ajoute son homologue américain, mais il a une faible expérience des affaires étrangères et manque de profondeur intellectuelle.  » Son collègue britannique n’est guère plus enthousiaste :  » Je pense que, sous le nouveau régime, l’atmosphère ne va pas être très heureuse au ministère des Affaires étrangères.  »

Au département, il règne comme un air de passation de pouvoir. Quelques diplomates flamands sont nommés à des postes clés pendant que quelques francophones se voient mis de côté. L’ambiance change progressivement. De nouvelles moeurs sont introduites. Moins aristocratiques, plus directes. Moins policées. Plus politisées aussi.

Adepte du changement, Van Elslande ne parvient pourtant pas à faire briller son étoile. Très vite, une réputation lui colle d’ailleurs à la peau : le nouveau ministre des Affaires étrangères serait paresseux. Et même  » étranger aux affaires « .  » Toute son ambition résidait, semble-t-il, dans la valeur symbolique que ce poste représentait pour la communauté flamande plutôt que dans la volonté de laisser sa marque sur la politique internationale « , notera Henri Simonet, l’un de ses prédécesseurs.

Autre difficulté : les fréquentes tensions avec le Premier ministre Edmond Leburton. Le socialiste wallon n’est pas du genre à se concerter avec son collègue flamand. Sans en informer celui-ci, il n’hésite pas à se rendre au Zaïre, et à y annoncer une augmentation de l’aide économique belge. Van Elslande ne supporte plus qu’on empiète sur ses plates-bandes. Fin 1973, il est à deux doigts de démissionner.

Ce n’est toutefois qu’en 1977 qu’il quittera ses fonctions. Sans jamais être parvenu à réellement convaincre. Finalement, si le grand Renaat entra sans doute dans l’histoire, c’est bien plus pour ce qu’il fut – le premier Flamand aux Affaires étrangères – que pour ce qu’il fit.

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