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1000 euros pour une matinée : les chers ménages d’Olivier Maroy (MR) pour André Gilles et Stéphane Moreau

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

C’était dans « une autre vie », dit Olivier Maroy (MR), aujourd’hui un des plus pugnaces Robespierre de la commission d’enquête Publifin, « au point que, souvent, la présidente doit me calmer », s’amuse-t-il. C’est à croire que parfois, vos existences passées vous rattrapent.

Parce que dans cette autre vie-là, avant d’être député wallon, Olivier Maroy était journaliste à la RTBF, où il régnait sur les dimanches midis. Et parce qu’il faisait aussi, comme certains de ses collègues et confrères, ce que la profession surnomme « des ménages », à savoir des prestations pour des sociétés (animation de débats, de conférences, de séminaires d’entreprises, etc.) Le tout étant, bien entendu, scrupuleusement rémunéré, et normalement signalé à la hiérarchie rédactionnelle, qui doit donner son accord.

Et surtout parce que l’un de ces ménages a attiré l’attention de certains ricaneurs qui, plutôt que Robespierre, appellent désormais Olivier Maroy le Marat d’eau douce : celui presté au très couru séminaire d’Ogeo Fund, à l’automne 2012 au Palais des Congrès de Liège. Chaque année, le fonds de pension liégeois, dirigé depuis sa fondation en 2007 par Stéphane Moreau et André Gilles, et qui pèse aujourd’hui son bon milliard d’euros, met les petits plats dans les grands en l’honneur de ses meilleurs clients. Cette année-là, l’organisateur avait manifestement décidé de donner à son raout des airs de Mise au Point, puisque Kroll égayait les discussions de ses dessins à main levée, et que c’est Olivier Maroy qui présentait les interlocuteurs et leur distribuait la parole.

« C’est une société active dans l’évènementiel qui m’a contacté », se rappelle l’ancien journaliste, qui ne voit, aujourd’hui encore, pas pourquoi il aurait dû refuser la proposition. « Pas que j’avais besoin d’argent, mais à partir du moment où vous disposez d’une expertise et que vous êtes sollicités, par ailleurs sur des questions intéressantes, je ne vois pas de raison de dire non. »

Il se remémore également, pour cette mission, avoir assisté à une petite réunion préparatoire, puis avoir passé une petite mâtinée en « Monsieur Loyal » de gentils débats sur les pensions avec Stéphane Moreau et André Gilles, respectivement administrateur délégué et président d’Ogeo Fund, bien sûr, mais aussi avec l’économiste Etienne de Callatay ou l’actuaire Anne Thiry, et puis enfin, bien entendu, avoir honoré le walking dinner de rigueur (noix de saint-Jacques rôties au thym, mignon de carré de cochon de lait au sirop d’érable et romarin, moelleux au chocolat et sa boule de glace à la vanille). « J’avais évidemment prévenu Jean-Pierre Jacqmin, mon directeur de l’information, qui avait accepté », dit-il. A la RTBF, ce dernier ne confirme ni n’infirme : il se retranche derrière le principe de confidentialité régissant l’exécution d’un contrat de travail.

Montant de la paie du journaliste en ménage ? Mille euros brut, pour deux centaines de minutes de passage de micro. Olivier Maroy a donc été payé hier par ceux-là mêmes qu’il passe ses journées d’aujourd’hui à interroger. Le député wallon n’y voit pas de problème, même s’il était convenu qu’aucun commissaire ne devait avoir jamais traité avec la nébuleuse : « Je suis droit dans mes bottes, je peux me regarder dans une glace ! Cette pratique est très répandue dans le milieu journalistique, tant que les balises sont respectées et que cela se fait de manière transparente… » Les années suivantes, l’humoriste flamand Bert Kruismans et le directeur des magazines francophones de Roularta, Amid Faljaoui ont par exemple tenu ce rôle pour le séminaire annuel d’Ogeo. « Et puis, moi », ajoute encore Olivier Maroy, « je me mettais des balises. Par exemple, je n’aurais jamais accepté de prester pour un parti politique, ou pour une structure liée à un parti politique ». Ce que n’est pas, donc, Ogeo Fund ? « Techniquement, Ogeo n’est pas une filiale de Publifin, et je ne pense pas que cette société ait été récemment pointée dans la vague de scandales qui nous occupe à la Commission d’enquête », dit-il, avant de mettre en garde contre les possibles dérives maccarthystes que charrie l’esprit du temps. « A cause de certains, notamment politiques, qui veulent se faire mousser et écorner à tout prix l’image du parti adverse. Il y en a même dans mon propre parti ! », dénonce-t-il.

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