Avec les réseaux sociaux, la fatwa aurait été plus dangereuse

(Belga) L’écrivain britannique Salman Rushdie a estimé lundi que les réseaux sociaux auraient accru son exposition au danger si la fatwa appelant à sa mort avait été lancée de nos jours, lors d’une conférence de presse à Berlin.

L’auteur, qui était dans la capitale allemande pour présenter son autobiographie évoquant une décennie passée à se cacher, souligne que la campagne menée contre lui en 1988 a été « très efficace et très internationale », avec seulement des téléphones et des fax. « Il n’y avait aucun email, aucun texto, pas de Facebook, ni de twitter, ni d’internet, et ça a bien sûr ralenti les attaques », a déclaré Rushdie. « Il aurait été tout à fait possible de mobiliser des gens à une vitesse bien plus grande contre le livre puisque tout le monde sait tout instantanément, cela aurait donc été plus dangereux aujourd’hui », a estimé l’écrivain. Il s’en est également pris à ce qu’il a appelé une « culture de l’offensé », jugeant absurde et attentatoire à la liberté d’expression de préconiser l’interdiction d’oeuvres artistiques pour la seule raison que des gens peuvent en être offensés. « Cette idée que d’une façon ou d’une autre nous pouvons demander à vivre dans un monde où rien ne nous offense est une absurdité », a ainsi jugé l’auteur âgé de 65 ans. Son livre de plus de 600 pages écrit à la troisième personne et intitulé « Joseph Anton », du nom du pseudonyme qu’il a utilisé pendant ses années de fuite, a été publié le mois dernier, au moment où des manifestations violentes et parfois meurtrières ont éclaté dans le monde musulman contre un film anti-islam américain. La publication de ces mémoires intervient 23 ans après que Rushdie est devenu la cible d’une fatwa iranienne appelant à sa mort pour injure prétendue à l’islam et au prophète Mahomet, dans son livre « Les versets sataniques ». Rushdie, qui a écrit onze romans, ainsi que des nouvelles et des essais, ne considère pas que la fatwa prononcée contre lui ait eu un effet profond sur sa façon d’écrire. « Je me suis dit en conscience… ne tombe pas dans le piège de la peur, ne tombe pas dans celui de la vengeance, essaie juste d’être et de continuer à être l’écrivain que tu es », a-t-il dit. (JOHANNES EISELE)

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