La Renault Scenic Hybrid Assist utilise la technologie hybride à 48 volts. © PG / RENAULT

La voiture électrique supplantée par une technologie hybride ?

L’avènement de la voiture électrique hypnotise le public. En fait, c’est l’hybride qui devrait rapidement triompher, à la fois pour des raisons environnementales et économiques. Notamment avec les hybrides « légers » à 48 volts qui débarquent discrètement.

Demain, tous hybrides ? C’est l’hypothèse qui flotte dans le secteur automobile. Les équipementiers comme Valeo, Bosch, Continental ou Delphi rivalisent pour aider les constructeurs à ajouter des moteurs électriques dans leurs voitures à carburant. Cela peut sembler contradictoire avec les annonces faites par Volvo, Volkswagen, Mercedes, BMW et d’autres, qui multiplient les projets de voitures 100 % électriques. En fait, aucun n’a renoncé à la voiture à carburant, au moins pour des raisons économiques.

Alors pour rendre les voitures rapidement plus propres, les modèles et les projets hybrides se multiplient. L’un des plus prometteurs est l’approche des hybrides à 48 volts. Renault ou Mercedes proposent ce type de véhicule. Ce sont des hybrides légers. Beaucoup d’autres devraient suivre, notamment chez PSA (Peugeot Citroën) ou Volkswagen. Il s’agit d’une technologie assez bon marché, qui n’ajoute que 500 à 1.000 euros au coût du véhicule, mais qui ne permet pas de rouler purement à l’électricité. Ce dispositif ressemble un peu aux vélos à assistance électrique : un moteur électrique vient aider le moteur à carburant durant certaines phases d’accélération. Une sorte de booster en somme. Il permet de réduire la consommation et les émissions de 10 à 20 %.

Un surcoût modéré, de 500 à 1.000 euros

Le dispositif est moins spectaculaire qu’une voiture hybride standard, comme une Toyota Prius, qui peut rouler quelques kilomètres en mode électrique, ou qu’une hybride rechargeable, dont les batteries plus importantes offrent une autonomie de 30 à 50 km. Ces modèles se sont répandus dans le haut de gamme (BMW, Porsche, etc.).  » Les plug in hybrid doivent utiliser deux motorisations, un réservoir et de grosses batteries, ils sont lourds et le surcoût par rapport à une voiture conventionnelle atteint 15.000 euros « , estime Ferdinand Dudenhöffer, dirigeant du Center automotive research de l’Université de Duisburg-Essen. Il ne se justifie guère que par un régime fiscal avantageux de voiture propre, partiellement érodé en Belgique à partir de 2018. Même une hybride rechargeable de taille moyenne est chère. La Golf GTE revient à 40.000 euros. La technologie mild hybrid, plus grand public, peut s’installer dans quasiment toutes les voitures, comme l’ont été l’ABS ou les start and stop, et n’exige pas de grands aménagements techniques. Elle s’adapte aux modèles existants.

Beaucoup de constructeurs jouent sur les mots en annonçant une électrification massive de leur gamme.

Les constructeurs ont de bonnes raisons de s’intéresser à l’hybride léger. Les normes d’émissions vont passer en 2021 d’une moyenne de 130 grammes de CO2 par kilomètre, sur toute la gamme d’un constructeur, à 95 g. Cet objectif devrait passer à 81 g en 2025 et 67 g en 2030. La manière la plus simple et économiquement la plus réaliste consiste à multiplier les approches de motorisation hybride.

Ainsi la Renault Scenic Hybrid Assist, qui recourt à la technologie hybride à 48 volts, est déjà conforme à l’objectif de 2021, alors que le modèle équivalent, non hybride, arrive à 100 g. Mercedes équipe ses voitures en commençant par ses véhicules premium, comme la Classe S, annoncé l’été dernier, puis la Classe E, avec l’objectif de couvrir toute la gamme.

Une bonne transition hors du diesel

L’évolution des normes d’émission devrait encore rendre viable la motorisation à carburant améliorée, notamment par l’hybridation.  » Nous estimons que pour arriver à une émission de CO2 de 70 g par kilomètre, il ne faudra pas ou très peu de ventes de véhicules électriques « , estime un briefing de l’ICCT (International Council on Clean Transportation), publié en novembre 2016.

Certains experts voient dans l’architecture hybride à 48 volts une approche idéale.  » C’est une technologie très intéressante. Elle récupère l’énergie du freinage. Le coût du système est raisonnable et montre une économie de carburant comparable à celle des moteurs diesels. Elle devrait permettre de faire la transition entre le diesel et les voitures électriques « , considère Ferdinand Dudenhöffer, qui voit cette technologie exclusivement couplée à un moteur à essence. Certains consultants, comme Evercore ISI, évaluent que 55 % des voitures vendues en 2025 seront équipées de cette technologie.

Le futur électrique est plutôt hybride

Si l’on examine attentivement les annonces des constructeurs qui se montrent les plus ambitieux dans la motorisation électrique, la part de l’hybride n’est pas mince. Même pour Volvo, qui avait fait les grands titres en juillet dernier, en annonçant une reconversion à la motorisation électrique. Le titre du communiqué, Volvo Cars to go all electric, laissait penser que le fabricant suédois allait se limiter à des modèles électriques à partir de 2019. Mais il annonçait que toutes les nouvelles Volvo  » auront un moteur électrique, marquant ainsi la fin historique des voitures équipées uniquement d’un moteur à combustion  » (toujours selon le communiqué). En fait, il incluait des véhicules hybrides légers à 48 volts. Ces véhicules pourraient même constituer une part importante de ses ventes.

Beaucoup de constructeurs jouent sur les mots en annonçant une électrification massive de leur gamme. Ils cherchent tous un peu à profiter de l’impact favorable de l’électrification sur la cotation boursière, sur le modèle de Tesla. La presse retient surtout les annonces de modèles purement électriques, mais il y aura aussi beaucoup d’hybrides, et ces derniers pourraient constituer la majeure partie des ventes tant que la voiture purement électrique n’offre pas un coût et une autonomie satisfaisants.

La technologie hybride 48 volts est dérivée des dispositifs start and stop (arrêt et démarrage automatique du moteur).
La technologie hybride 48 volts est dérivée des dispositifs start and stop (arrêt et démarrage automatique du moteur).© ISTOCK

Toyota sceptique

Tout le monde n’est pas enthousiaste envers les hybrides à 48 volts. Toyota n’en veut pas.  » Nous disposons déjà d’une large gamme de modèles hybrides à haut voltage – plus il est élevé, plus faible est la perte de courant -, cela ne nous paraît pas intéressant d’ajouter des systèmes à 48 volts, qui peuvent apporter des avantages mais augmentent aussi le coût « , indique Kristof Pitteljon, porte-parole de Toyota Europe. Les hybrides construites par Toyota utilisent du courant de plusieurs centaines de volts. Certains puristes dénient, du reste, le terme  » hybride  » à la technologie 48 volts. Cette dernière est après tout dérivée des dispositifs start and stop (arrêt et démarrage automatique du moteur), qui ont brièvement été qualifiées de  » micro-hybride  » voici une dizaine d’année. La Febiac, par exemple, ne les intègre pas dans les statistiques de voiture hybrides, estimant que l’hybride 48 volts ne roule jamais à l’électricité.

Pour les équipementiers, cette tendance fait partie des nouveaux marchés, avec les technologies de pure motorisation électrique et les dispositifs de conduite autonome. UBS estime ce marché des hybrides légers à 11 milliards d’euros pour 2020, juste pour les équipements, et à 22 milliards pour 2024.

La diversification des équipements hybrides devrait s’étendre davantage. Il se pourrait que ce type d’hybride léger permette quand même, dans certaines conditions, de rouler purement en mode électrique à basse vitesse. Il commence à être utilisé dans des modèles haut de gamme pour améliorer le temps de réaction d’un moteur avec un compresseur électrique 48 volts, qui va aider à réduire la consommation. Cet équipement peut venir en complément du dispositif hybride léger. Sans parler des formules pour transformer une voiture à deux roues motrices en tout-terrain temporaire, en installant un moteur électrique sur l’essieu arrière, qui intervient juste quand les circonstances l’exigent : terrain boueux, neige, etc. Pour profiter des avantages d’un tout-terrain sans payer le prix d’une transmission intégrale, qui fait grimper la consommation. Ces hybridations à la carte permettent de commercialiser des voitures moins polluantes et plus pratiques à un coût moindre qu’un véhicule totalement électrique.

Les équipementiers gagnants

La plupart des équipementiers investissent dans ces dispositifs. Pour sa Scenic, Renault a eu recourt à l’allemand Continental. Le champion du marché est le français Valeo, qui capitalise sur une de ses spécialités, les alternateurs et les démarreurs. Il avait inventé le dispositif start and stop qui éteint le moteur lorsque le véhicule est arrêté, et le relance au démarrage, en fusionnant en une seule pièce deux éléments naguère séparés : le démarreur pour lancer le moteur et l’alternateur, qui produit le courant électrique. Ce dispositif couplé a été inventé en 2004. Les hybrides légers à 48 volts sont en quelque sorte dérivés, car c’est un alternateur/démarreur qui va aider le moteur dans les phases d’accélération, pendant quelques secondes, dans une version à 48 volts, plus puissante que le dispositif utilisé à 12 volts.

L’activité transmission de Valeo représente actuellement le quart de ses ventes (4 milliards d’euros sur un total de 16,2 milliards en 2016). La demande pour l’électrification des voitures, dans toutes les variantes d’hybrides, est telle que Valeo estime pouvoir doubler ses ventes dans ce secteur d’ici 2021 (8 milliards d’euros). Le français a signé plus de 20 contrats pour fournir des constructeurs chinois. Cet équipementier est convaincu que toutes les voitures seront plus ou moins électrifiées, selon des besoins qui dépendront du type de véhicule. Les toutes petites pourraient être totalement électriques, les moyennes, des hybrides à 48 volts, les plus grandes, des hybrides rechargeables ou totalement électriques pour obtenir des performances importantes comme les Tesla.

Dans tous les cas, les équipementiers vont y gagner, car la part de leur valeur ajoutée dans les véhicules va augmenter. Cela devrait renforcer une tendance qui fait de ces sociétés des entreprises plus rentables que bien des constructeurs d’automobiles.

Une part encore modeste

Les modèles électrifiés restent encore marginaux dans le parc automobile belge. Ces autos ne représentent que 0,7 % pour les hybrides et un microscopique 0,1 % pour les voitures électriques. Les chiffres sont bien sûr plus élevés quand on parle des immatriculations récentes. Les hybrides et les pures électriques pesaient en 2016 environ 3 % du total des voitures vendues et immatriculées.

Variantes de plus en plus nombreuses

La Toyota Prius, une voiture hybride simple ou rechargeable.
La Toyota Prius, une voiture hybride simple ou rechargeable.© ISTOCK

Les motorisations hybrides se multiplient. En voici quelques catégories :

Motorisation hybride simple. Elle est constituée d’un moteur à carburant et d’un ou plusieurs moteurs électriques, qui fonctionnent ensemble ou séparément. La Toyoto Prius (ou Yaris, Auris), fort populaires, utilisent ces dispositifs, ainsi qu’une batterie d’environ 1,3 kWh. Les moteurs électriques peuvent ainsi  » aider  » le moteur à carburant, et la batterie, qui se recharge en roulant, permet de rouler quelques kilomètres en mode électrique.

Range extender. Il s’agit d’un dispositif installé sur des voitures présentées comme étant électriques. Un moteur à carburant anime une génératrice pour alimenter les moteurs électriques, et ainsi étendre le rayon d’action du véhicule lorsque la batterie est épuisée. Les Opel Ampera fonctionnent de cette manière et aussi certains modèles i3 de BMW, pour éviter l’angoisse de l’autonomie. Même si elles ne sont pas présentées comme telles, ces voitures sont bel et bien des hybrides.

La BMW i3 peut être dotée d'un
La BMW i3 peut être dotée d’un  » range extender « , un  » petit groupe électrogène  » qui prolonge l’autonomie de la voiture.© ISTOCK

Hybride rechargeable. Il s’agit d’une voiture hybride dotée d’une batterie assez importante (4 à 10 kWh) pour parcourir 30 à 50 km. Pour bénéficier de l’autonomie complète en mode électrique, il est indispensable de recharger les batteries régulièrement, car ces dernières ne peuvent pas totalement se recharger en roulant en mode carburant.

Hybride 48 volts. Ou mild hybrid. Un circuit à 48 volts est créé en plus de celui, habituel, de 12 volts, ce qui permet d’alimenter un puissant alterno-démarreur qui va aider le moteur à carburant en phase d’accélération ou à basse vitesse. Le dispositif est branché sur une petite batterie de 48 volts, réalimentée par un dispositif de régénération utilisant l’énergie des freinages, plus efficace que les dispositifs à 12 volts qui existent déjà. Une manière indirecte de réduire la consommation et les émissions est d’alléger la charge du moteur en utilisant la batterie de 48 volts pour alimenter des équipements électriques comme la direction assistée ou l’air conditionné.

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